Auteur de plusieurs essais, dont une récente Oraison funèbre de la classe de philosophie (Éd. Atlantiques Déchaînés, 2020), Harold Bernat est professeur agrégé de philosophie au lycée Montesquieu de Bordeaux. À travers ses textes, il invite le lecteur à s’emparer à nouveau du politique par l’exercice préalable de la pensée critique. Voix de l’Hexagone a engagé le dialogue avec lui pour évoquer l’époque et ses impasses.
Propos recueillis par Pierre-Henri Paulet.
Voix de l’Hexagone : En qualité d’enseignant, vous avez assisté aux premières loges à l’enterrement de la « classe de philosophie ». Avec la disparition de la série L et de ses huit heures hebdomadaires de philo, qu’est-ce que le lycée et la jeunesse ont perdu ?
Harold Bernat : Un rappel historique. L’épreuve de philosophie au baccalauréat remonte à 1808. Cette année, elle sera rendue facultative. Dans le jargon de l’école à la carte, on appelle cela “une note bonus”. L’élève consommateur de notes, client plus qu’étudiant, pourra choisir sa note, celle de l’épreuve ou sa moyenne annuelle. Les conditions sanitaires ne justifiaient absolument pas ce choix clientéliste et démagogique puisque le “grand oral”, une épreuve construite sur le modèle en vogue des concours d’éloquence, lui, aura bien lieu et ne sera pas facultatif. Autrement dit, entre une épreuve bi-séculaire écrite et un oral qui a toutes les caractéristiques de la communication contemporaine, l’arbitrage est allé dans le sens de la dévalorisation disciplinaire. L’argument qui consiste à dire que dans ces conditions sanitaires exceptionnelles, les élèves ne sont pas prêts pour passer le fameux “grand oral” ne tient pas pour le ministère. Comment lui donner tort : quand les disciplines disparaissent, l’élève est toujours prêt pour causer debout et vendre son parcours scolaire à des adultes, peu importe le contenu de l’enseignement qu’ils délivrent, peu importe qu’il soit même professeur.
Ce que l’on appelle “classe de philosophie” correspondait à la classe terminale. À cet âge, l’élève, à la fin de son cycle de lycée, est jugé apte à interroger, de façon critique et réflexive, des notions abstraites, à donner du sens aux contenus des enseignements qu’il a pu recevoir dans sa scolarité, capable de déployer une pensée plus autonome. C’est d’ailleurs le sens de l’épreuve de dissertation philosophique : un sujet ouvert, interrogatif, qui n’appelle pas la restitution…
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Auteur: Pierre-Henri Paulet