Leur propagande vient de loin, et nous le savons — Bruno GUIGUE

Ces empires coloniaux comme entités historiques ont fini par s’effondrer, mais le colonialisme comme système leur a survécu.

Lorsque le G7 inflige des sanctions à la Russie en 2022, il ne réunit pas seulement les nations qui ont le PIB le plus élevé du monde occidental et apparenté. Il rassemble des pays qui ont jadis pris part à l’aventure coloniale et sont hantés par le déclin de leur suprématie : les États-Unis, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie, le Canada et le Japon.

Cette continuité entre deux formes historiques de domination est une donnée qu’il faut avoir en mémoire : l’impérialisme d’aujourd’hui est l’héritier du colonialisme d’hier.

Faisons d’abord un petit retour en arrière. Le propre du discours colonial, c’est qu’il déshumanisait le colonisé.

« Comme pour illustrer le caractère totalitaire de l’exploitation coloniale, le colon fait du colonisé une sorte de quintessence du mal. La société colonisée n’est pas seulement décrite comme une société sans valeurs. Il ne suffit pas au colon d’affirmer que les valeurs ont déserté, ou mieux n’ont jamais habité le monde colonisé. L’indigène est déclaré imperméable à l’éthique, absence de valeurs, mais aussi négation des valeurs. En ce sens, il est le mal absolu. Élément corrosif, détruisant tout ce qui l’approche, élément déformant, défigurant tout ce qui a trait à l’esthétique ou à la morale, dépositaire de force maléfiques, instrument inconscient et irrécupérable de forces aveugles, écrit Frantz Fanon ».

On imagine les conséquences. Guerre du Bien contre le Mal, la colonisation n’est pas tant une entreprise civilisatrice qu’une mesure prophylactique destinée à neutraliser les miasmes d’une bestialité latente.

« Parfois ce manichéisme va jusqu’au bout de sa logique et déshumanise le colonisé. A proprement parler, il l’animalise. Et, de fait, le langage du colon, quand il parle du colonisé, est un langage zoologique. On fait allusion aux mouvements de reptation du jaune, aux émanations de la ville indigène, aux hordes, à la puanteur, au pullulement, aux gesticulations ».

L’impérialisme d’aujourd’hui a-t-il changé de registre ? L’appétit de richesse a beau revêtir les oripeaux des « droits de l’homme », il charrie la même violence symbolique. Comme le colonialisme, l’impérialisme déshumanise à tour de bras. Il transforme la guerre juste en guerre sainte, il en fait en prophylaxie de masse où le nombre ahurissant des victimes immolées sur…

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Auteur: Bruno GUIGUE Le grand soir