L'Europe, triste solitude [2/3]

Nous publions cette semaine le deuxième volet du triptyque dépliant la solitude européenne. Eduardo Casais tisse une trame narrative qui fait dialoguer les mythes fondateurs de la Grèce Antique avec la rationalité néolibérale de notre époque actuelle. De la diffusion de la philosophie des Lumières en passant par l’industrialisation, l’avènement des démocraties libérales, les guerres et les démembrements de puissances souveraines, l’Europe apparait dans ce deuxième volet comme puissance vacataire peu perspicace. Et toujours aussi seule.

« Aussi bien une société où la paix n’a d’autre base que l’inertie des sujets, lesquels se laissent conduire comme un troupeau et ne sont exercés qu’à l’esclavage, ce n’est plus une société, c’est une solitude. » Baruch Spinoza, Traité politique, Charpentier, 1861, 5, 4.

La belle du mythe

D’aucuns soutiennent que les mythes sont à la pensée rationnelle ce que le bricolage serait à l’œuvre de l’ingénieur. « Loin d’être, comme on l’a souvent prétendu, l’œuvre d’une « fonction fabulatrice » tournant le dos à la réalité, les mythes offrent pour valeur principale de préserver des modes d’observation et de réflexion exactement adaptés au concret, une sorte de bricolage intellectuel pouvant atteindre des résultats brillants et imprévus. » Cela doit valoir la peine de rendre une petite visite aux mythes fondateurs de notre civilisation, histoire d’écouter ce qu’ils nous révèlent sur l’Europe.

Le soleil brille dans le ciel d’azur. La brise chaude invite aux ébats dans l’onde fraîche. Ce jour-là, Zeus surprend la séduisante Europe en train de folâtrer avec ses jeunes compagnes sur les sables blancs de la plage phénicienne. C’est le coup de foudre. Taraudé par le désir, le dieu se transforme en taureau pour approcher la belle. Imprévoyante, la pucelle commet l’enfantillage de chevaucher la bête qui, d’un élan soudain, l’enlève pour la déposer dans son nid d’amour en Crète. Après y avoir goulûment apaisé le feu de sa passion à l’ombre des platanes, rassasié, il se débarrasse de la jouvencelle en l’offrant en mariage à Astérion, le roi local.

Agénor, père d’Europe, enjoint à ses quatre fils de chercher la disparue et de la ramener au foyer. Et qu’ils ne s’avisent pas de se présenter devant lui sans leur sœur. Ils quittent la maison pour se lancer dans une quête infructueuse. N’osant pas reparaître devant le père sur cet échec, chacun va refaire la vie de son côté et…

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Auteur: lundimatin