La notion d’interprétation est de plus en plus présente dans le monde de l’intelligence artificielle. Pour l’humain, il s’agit d’interpréter des algorithmes difficiles à expliquer mathématiquement. Pour la machine, l’enjeu est d’interpréter des données afin d’en tirer des conclusions. Et, depuis peu, elle doit interpréter une brève instruction en langage naturel : c’est le principe de fonctionnement de ChatGPT et de la dernière innovation d’OpenAI, son modèle GPT-4o qui interagit par la voix avec une fluidité troublante. Nous pouvons ainsi parler d’un véritable tournant interprétatif de l’IA.
L’art d’interpréter est néanmoins connu depuis des siècles sous le terme d’herméneutique. Il s’est d’abord appliqué à la lecture des poètes ou des textes sacrés avant de se muer en courant philosophique pour signifier que l’interprétation est au fondement de la compréhension, voire qu’elle représente l’activité nécessaire de l’être que nous sommes. Notre accès au monde est en effet toujours influencé par certaines tonalités qui ne sont pas neutres, mais empreintes d’une charge culturelle. Seulement, la ressemblance s’arrête-t-elle à la simple utilisation du terme d’interprétation ? Autrement dit, l’IA fait-elle de l’herméneutique ? Doit-on en faire pour la comprendre ? Ou est-ce les deux à la fois ?
Dialoguer directement avec la machine dans notre langue
L’événement qui parachève le tournant interprétatif de l’IA est sans nul doute la mise en ligne de ChatGPT, en novembre 2022. L’innovation essentielle des grands modèles de langage, comme le sien, est qu’il est exigé de la machine qu’elle interprète les instructions de l’humain plus que cela n’a jamais été le cas. L’internaute entre un « prompt » pour demander ce qu’il veut, puis le système lui fournit une réponse, qu’il s’agisse d’un texte, d’une image ou d’un propos à voix haute….
La suite est à lire sur: theconversation.com
Auteur: Rémy Demichelis, Docteur en philosophie, Université Paris Nanterre – Université Paris Lumières