L’immunité, l’exception, la mort [2/3]

Les effets de l’épidémie de covid-19 sont encore mal connus. Des corps qui toussent, d’autres qui suffoquent, des visages qui se masquent, des regards qui fuient, tout cela est bien visible. Mais ce que tout cela est venu suspendre dans la marche économique des choses, la manière dont cela a pu libérer ou névroser les subjectivités, reconfigurer la manière dont on se rapporte au monde, nous le découvrons à peine. Tout appelle une certaine humilité. Néanmoins, la forme de gouvernementalité qui prétend régir cette situation exceptionnelle ne s’est pas révélée avec le virus, elle l’avait à sa manière très largement anticipé.

Voici le second volet d’un triptyque qui tente modestement de lire la situation en cours depuis les travaux antérieurs de philosophes qui ont travaillé le rapport entre gouvernement, pouvoir, corps et maladie. Ce qu’on appelle souvent trop rapidement la biopolitique. Là semaine passée nous partions des travaux de Roberto Esposito, cette semaine c’est au tour de Giorgio Agamben, la semaine prochaine abordera Michel Foucault.

Les éditions Quodlibet viennent de rassembler dans un recueil intitulé « A Che punto siamo ? L’epidemia come politica » l’ensemble des interventions de Giorgio Agamben depuis le 26 février, date de son retentissant article d’Il Manifesto, « L’invenzione di un’epidemia ». Mis ainsi bout à bout, les chroniques du philosophe italien forment un livre dense, explosif, qui est à la fois le testament politique de l’œuvre, sa rencontre la plus brûlante avec notre présent et la récapitulation de son enseignement.

Rarement aura-t-on senti la singularité d’une pensée se confronter à l’Histoire en train de se faire avec autant d’urgence et d’intensité, comme si tout ce que pouvait valoir l’œuvre se jouait ici et maintenant, dans le corps-à-corps avec l’événement, cet état d’urgence sanitaire et les mesures d’exception que l’État…

Auteur : lundimatin
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