L'utopie ?

Que reste-t-il à dire ou à faire une fois que tout a été dit, analysé, décortiqué de l’humiliation que représente pour toutes et tous le pouvoir et ses mécanismes ? Depuis Beyrouth, Ghassan Salhab propose de viser toujours plus loin, jusqu’à frayer une voie vers « l’improbable et ultime utopie ».

J’essaye de comparer un nuage

à un cerf.

Je ne peux pas.

Avec le temps se raréfient

les bons mensonges

Yannis Ritsos

Que dire encore qui n’a été dit, redit, écrit, réécrit ? D’où puiser encore ? Chaque menu détail de notre quotidien, comme toute structure institutionnelle ou pseudo-institutionnelle, ou encore traditionnelle, coutumière, quelle que soit l’échelle, ont été plus d’une fois décortiqués, analysés, contextualisés. Les différents régimes de pouvoir qui nous enserrent, nous calibrent, nous tiennent, nous enchaînent, « ici », dans notre aberrante tambouille politico-clanique-financière (on ne sait vraiment plus comment encore nommer ça), comme partout ailleurs en ce monde, semblent plus que jamais inébranlables. Colosses aux pieds d’argile, certes, colosses cependant, toujours prêts à écraser, sans la moindre hésitation. Se répéter encore cela et chercher un nouvel angle, une nouvelle approche qui puisse durablement (les) ébranler ? Mais quand la détresse n’a de cesse de gagner du terrain, à la fois individuellement et collectivement, qu’elle n’en finit plus de hurler son nom, qu’elle se fait plus que jamais abîme, que reste-t-il sinon les coups, qu’ils soient de boutoir, spectaculaires, ou tout au contraire, imperceptibles, quasi invisibles, c’est à dire loin des médias et des réseaux sociaux, loin de toute résonnance passagère ? Que reste-t-il sinon les actes sans lendemain ? Que reste-t-il quand les lendemains précisément ne sont plus promesses de quoi que ce soit, que les différents pouvoirs nous la jouent réaliste, pragmatique, fataliste tant qu’à faire, s’exonérant bien évidemment de toute responsabilité, continuant sans vergogne de faire payer toute sorte de prix à ceux-là même qui en paient déjà considérablement le prix ? Que reste-t-il quand l’on constate que cette crise leur est pain bénit, que rien n’arrête l’effrénée trajectoire des gains et des profits (toujours à dénicher de nouveaux territoires où puiser, pomper, fut-ce hypothétiquement), que les chiffres sont de plus en plus vertigineux, absurdes ?

Pris dans ce piège infernal, de jour comme de nuit, à devoir tenir envers et contre tout, malgré la pénurie de plus d’un produit de première…

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Auteur: lundimatin