Marc Dufumier : « Si le gouvernement le voulait, on pourrait commencer la transition agricole la semaine prochaine »

Basta! : Le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) a publié fin février un nouveau rapport, très alarmiste, qui revient notamment sur le poids de l’agriculture dans le changement climatique. Comment l’agriculture contribue-t-elle à cette évolution du climat qui menace la vie sur terre ?

Marc Dufumier est agronome. Il a enseigné à AgroParisTech de 2002 à sa retraite en 2011. Expert auprès de la Banque mondiale et de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation (FAO), il a été membre du Conseil stratégique de l’agriculture et de l’agro-industrie durables (CSAAD) au ministère de l’Agriculture. Il a écrit de nombreux ouvrages dont De la terre à l’assiette. 50 questions essentielles sur l’agriculture et l’alimentation, publié en 2020 chez Allary Éditions.

Marc Dufumier : L’agriculture industrielle est une grande contributrice à l’effet de serre. La première cause d’émission de gaz à effet de serre, à l’échelle mondiale, c’est la déforestation, notamment amazonienne, qu’impose la culture de soja nécessaire à l’alimentation de nos élevages industriels. Ces émissions sont certes lointaines, mais bien réelles.

Il y a ensuite les émissions de méthane, produits par les rots des ruminants ; brebis, chèvres, vaches. Le méthane est 28 fois plus réchauffant que le CO2. C’est le second gaz en terme de contribution à l’effet de serre de l’agriculture mondiale, et française. Mais en France la principale source de production de gaz à effet de serre, c’est le protoxyde d’azote (N20). Libéré quand on épand des engrais azotés de synthèse (dont notre pays fait grand usage), il est presque 300 fois plus réchauffant que le CO2. C’est très grave, et totalement ignoré.

Ces engrais sont en plus très coûteux en termes de consommation d’énergie fossile, puisqu’ils sont fabriqués à partir de gaz russe et norvégien. Avec l’actualité de la guerre en Ukraine, on voit à quel point cela pose des problèmes de dépendance. Les coûts de ces engrais vont grimper monstrueusement. Cela va mettre de nombreux agriculteurs en difficulté. On aurait pu anticiper cette dépendance il y a déjà une trentaine d’années, en tournant le dos à l’agriculture industrielle.

Le rapport du Giec insiste par ailleurs sur le lien entre le climat et la biodiversité. Protéger l’un, c’est prémunir la destruction de l’autre. Et vice-versa. Or, les effets de l’agriculture industrielle sur la biodiversité sont…

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Auteur: Nolwenn Weiler