Marx sur le Capital comme dieu réel — Ian WRIGHT

Introduction

Il y a un aspect spécifique de la théorie du capitalisme de Marx qui, à mon avis, n’est pas suffisamment souligné. Il s’agit de l’opinion de Marx selon laquelle le capital est une entité réelle – un être doté d’un esprit propre qui fonctionne indépendamment de nous.

Et bien sûr, lorsqu’elle est énoncée aussi clairement, cette proposition semble absurde. Comment une grosse somme d’argent utilisée pour faire du profit peut-elle avoir un esprit propre ? Cela n’a aucun sens.

Mais mon but, ici, est d’expliquer précisément pourquoi cette proposition n’est pas absurde, mais articule en fait la nature essentielle du capital, et que considérer le capital comme une entité est nécessaire pour comprendre pleinement la réalité sociale dans laquelle nous nous trouvons.

L’entité étrangère de Marx

Marx considérait le capitalisme comme une formation sociale semi-consciente sous l’emprise de lois économiques objectives que personne ne contrôle vraiment. Et Marx souligne à plusieurs reprises que le capitalisme reproduit la mystification religieuse que nous trouvons dans les étapes précédentes de l’histoire, mais sous de nouvelles formes – comme le fétichisme de la marchandise. Il est donc tout à fait typique pour Marx d’employer des métaphores religieuses lorsqu’il discute du capitalisme.

Mais Marx, dans des commentaires sur James Mill écrits en 1844, dit quelque chose de plus. Après avoir fait valoir son argument typique selon lequel l’essence de l’argent est un type spécifique de pratique sociale – plutôt qu’une propriété d’une chose matérielle, comme l’or – il dit ensuite que notre pratique sociale est devenue une chose matérielle indépendante – une entité réelle, un « vrai Dieu » – qui a de réels pouvoirs de causalité. Et que nous sommes esclaves de ce dieu, et que son culte est devenu une fin en soi.

L’essence de l’argent est … l’activité ou le mouvement médiateur, l’acte humain et social par lequel les produits de l’homme se complètent mutuellement, s’est séparé de l’homme et devient l’attribut de l’argent, une chose matérielle extérieure à l’homme. Puisque l’homme aliène cette activité médiatrice elle-même, il n’est actif ici que comme un homme qui s’est perdu et qui est déshumanisé ; la relation elle-même entre les choses, l’opération de l’homme avec elles, devient l’opération d’une entité extérieure à l’homme et au-dessus de l’homme. Grâce à cet intermédiaire extérieur – au lieu que ce soit…

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Auteur: Ian WRIGHT Le grand soir