Matthieu Montalban : « Le bitcoin est devenu un moyen d’enrichissement pour une nouvelle classe de jeunes capitalistes »

Matthieu Montalban est maître de conférences HDR en science économique, chercheur au GREThA (UMR – CNRS 5113) de l’Université de Bordeaux. Spécialiste des cryptomonnaies, ancien membre des Économistes atterrés, il est notamment le co-auteur de Pouvoir et crise du capital : Marx, penseur du XXIe siècle, paru en 2012 et Rester humain – Lacan et le lien social postmoderne, sorti en mars 2020.

Propos recueillis par Ella Micheletti.


Voix de l’Hexagone : Tout d’abord, pouvez-vous définir ce qu’est le bitcoin ?

Matthieu Montalban : Le bitcoin est la première cryptomonnaie, c’est-à-dire une monnaie émise via un algorithme qu’on appelle une blockchain. Une blockchain est un registre distribué sur l’ensemble des ordinateurs d’un réseau, qui permet de répertorier et de « notariser » l’ensemble des transactions sur un réseau, tout en évitant un problème dit de « double dépense » (dépenser en même temps, pour différents usages, le même bitcoin). Ce registre est inviolable car il impliquerait de tels coûts et une telle puissance de calcul pour un pirate que l’action serait irrationnelle. En effet, la blockchain du bitcoin fait appel à ce qu’on appelle un mécanisme de consensus par preuve de travail, c’est-à-dire que l’ensemble des ordinateurs du réseau (« les mineurs »), vont utiliser leur puissance de calcul pour résoudre des calculs compliqués nécessitant de consommer de l’énergie pour s’assurer que les transactions sont valides. Quand un bloc de transaction est validé, il va être rattaché par tous les autres qui l’ont précédé et il sera possible de retracer les transactions – bien que pseudonymisées – impliquant pour un pirate la nécessité de réécrire non pas un bloc mais l’ensemble de la chaîne de bloc, ce qui serait impossible et détecté rapidement.

VdH : La création des bitcoins en 2009 a-t-elle un lien de cause à effet avec la crise de subprimes qui a commencé en juillet 2007 ?

M.M. : Le bitcoin a été codé par un ou des codeurs sous le pseudonyme de Satoshi Nakamoto. S’il est né au moment de la crise des subprimes et si, effectivement, ces moments de crise sont souvent des sources d’innovations monétaires, il semblerait que le projet germait déjà depuis un moment chez Satoshi Nakamoto. D’autres comme Nick Szabo ou Wei Dai avaient émis l’idée quelques années avant de créer une monnaie numérique qui s’émanciperait de la tutelle des États et des banques (privées et centrales). Disons que la crise a…

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Auteur: Ella Micheletti