Mauvaises conditions de travail et perte de sens : une vague de démissions gagne la France

Imaginez des lignes de production à l’arrêt. Des produits qui ne sont ni transformés, ni conditionnés, ni livrés en magasin. Des entreprises incapables d’honorer leurs commandes par manque de salariés. C’est ce que vit actuellement le secteur de l’agroalimentaire qui emploie 70 000 personnes en Bretagne.

« On est confrontés à tous les niveaux, jusqu’aux cadres, à des difficultés de recrutement, constate Michel Le Bot, secrétaire général de la CFDT Agri Agro du Finistère. C’était déjà le cas avant le Covid, mais là on voit des salariés qui se questionnent sur leur avenir, sur le sens de leur travail, leur utilité, l’orientation qu’ils veulent donner à leur vie professionnelle. Certains changent d’entreprise, d’autres de métier. »

Le secteur agroalimentaire est loin d’être une exception. 100 000 postes vacants sont à pourvoir chez les soignants, 200 000 dans les services à la personne, dont 25 000 aides à domicile. En hôtellerie restauration, 250 000 emplois n’ont pas été pourvus en 2022. Les difficultés de recrutement atteignent aussi des niveaux inégalés dans l’industrie manufacturière et le bâtiment.

Il n’y a jamais eu autant de départs volontaires en France

La France connaît-elle un phénomène de « grande démission » analogue à la Great Resignation aux États-Unis ? En 2022, près de deux millions de personnes ont posé leur démission, dont 520 000 personnes dans les trois premiers mois de l’année. 90 % des salariés concernés étaient en CDI.

« On voit des salariés qui se questionnent sur le sens de leur travail, leur utilité »

Le record précédent datait du premier trimestre 2008 avec 510 000 démissions. D’après le ministère du Travail, la situation ne serait pas inédite ni inattendue. « La hausse du taux de démission apparaît comme normale, en lien avec la reprise à la suite de la crise du Covid-19 », analyse la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), rattachée au ministère du Travail.

Le problème serait purement conjoncturel, lié à la baisse du chômage. La plupart des démissionnaires quitteraient plus facilement leur emploi pour en trouver un autre. Six mois après leur démission, huit sur dix auraient ainsi retrouvé un emploi.

« Il y a un déni du problème par les employeurs et la Dares. Le message, très politique, c’est “circulez, il n’y a rien à voir” », fustige l’économiste Thomas Coutrot, qui a lui-même travaillé à la Dares. D’après lui, la situation serait…

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Auteur: Sophie Chapelle