Ce texte prolonge celui paru le 20 janvier. Je pensais écrire en restant « au ras du réel », mais là, je me risque à dire d’autres choses, par petits bouts. Mayotte, l’Océan Indien, côtes africaines et malgaches… un monde fait de réalités qui s’entrechoquent. Tout se tient, même de loin, des intérêts les plus personnels aux intérêts internationaux.
Des fruits, des fruits !
Le nourrissage des makis est plus que nécessaire, tous les vivants fragilisés depuis Chido sont en souffrance, pas d’exception. L’objectif est simple : maintenir autant que possible des individus dans des habitats encore préservés, éviter qu’ils aillent vers les villes et leurs poubelles immondes. Pour l’« accoutumance alimentaire », le risque est minime, l’apport est de toute façon insuffisant, et ils se nourrissent en cette période des fleurs de l’arbre à soie, sève, feuilles, certains fuient systématiquement et restent très craintifs.
C’est le responsable du rayon fruits et légumes d’une grande surface qui accepta, au vu de la situation exceptionnelle, de me donner quelques kilos chaque semaine, à condition que je n’en fasse pas commerce – à l’ordinaire ces fruits sont transmis aux agriculteurs pour faire du compost. De retour du collège, je file à l’autre bout de la ville récupérer le carton de fruits abîmés ; au menu du jour : pommes, poires, kiwis. Je rentre sous un soleil de plomb, pas une once de brise marine, ça coule à travers le carton, ça me dégouline sur le short, ma sueur me pique les yeux, la côte est rude. Je prépare en cuisine une première tournée de fruits. Les moustiques s’acharnent.
A la pointe Mahabou – nourrissage tous les 2-3 jours – je retrouve au même lieu, au pied d’un arbre déchiré, le groupe de six individus, dont un juvénile. Nous avons maintenant nos habitudes. Une fois nourris, les makis acceptent ma présence à leur côté, s’assoupissent le ventre tendu ;…
Auteur: dev