Megan et ses fantômes

Parler ou écrire sur le rap, et de manière plus générale sur la musique, n’est pas chose aisée. Cerner dans un genre musical et une période donnée des tendances, des courants ou des lignes directrices, c’est-à-dire à la fois du commun (aux différents artistes) et du singulier (au regard des décennies passées), l’est encore moins. C’est dans cette drôle d’idée et cette douce folie que se sont installés Mohamed Magazza et Nicolas Pellion, le temps d’un bien bel ouvrage qui parait ce mois-ci aux éditions Audimat. Intitulé L’Enfer sur Terre, il se présente comme une Odyssée américaine, plus précisément une traversée en trois-cent pages des mondes du rap de la dernière décennie – de Billy Woods à Kendrick Lamar, de Kanye West à Kevin Gates en passant par Chief Keef ou Earl Sweatshirt et quelques dizaines d’autres. Amateurs – ou faut-il dire amoureux – éclairés, les deux auteurs s’en sortent en redécouvrant les vertus de la déambulation, du carnet de voyage ou du road movie : de ville en ville, d’année en album, un paysage finit par se dessiner, duquel ressort bien quelque chose comme l’esprit d’une époque, ou au moins – mais au sens fort – son esthétique : une certaine manière de sentir, et de matérialiser ce ressenti dans un objet sonore. Une étrange combinaison musicale et textuelle, romantique peut-être ou post-romantique, de l’hyper-conscience et du désenchantement le plus radical face à la violence du monde (sociale et raciale notamment) et d’un lâchage tout aussi intégral dans la fabulation by all means necessary : retour aux textes sacrés et aux mythologies anciennes et modernes, visions oniriques et fantastiques, science-fiction… Quelque chose peut-être comme une nostalgie ou une « volonté de croyance » chez ceux qui n’y croient plus. Mais comme souvent en pareille matière, c’est dans les détails que se trouve la divinité – en l’occurrence dans les portraits…

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Auteur: Mohamed Magassa, Nicolas Pellion