Melmoth furieux de Sabrina Calvo

Melmoth furieux paru début septembre aux Editions La Volte comporte un marque page reproduisant l’image de couverture et contenant en quelques mots toute la structure du récit : « de Belleville à Marne-la-vallée, une bande d’enfants part en croisade pour mettre le feu à Eurodisney. »

Comme n’importe quel pitch, cette phrase dit tout du livre et en même temps rien. Ce bref résumé révèle pourtant l’unique source possible de suspense : Ils vont mettre le feu à Eurodisney. Non sans humour, c’est toute la psychose du « spoil » qui est désarmée. Preuve qu’au final, une bonne fiction ne craint pas le « divulgâchage » qui, avant d’être une psychose de masse est une angoisse de commerçant : qu’on ne « gâche » pas l’élément d’intrigue moisi sur lequel tient parfois l’économie d’un mauvais produit culturel. C’est pourquoi ce livre, ne reposant pas sur un ou quelques ressorts narratifs mécaniques mais sur une intensité qualitative, ne craint pas que soit divulguer certains éléments de son histoire ni sur son marque page, ni, je l’espère, dans un article de critique. Tout en faisant office de présentation du livre, nous entendons bien entrer dans le cœur du récit, que les consommateurs à suspens s’en détournent ou se ravisent – je vous promet que la richesse imaginative de l’autrice est telle qu’aucun texte critique ne parviendra à l’étouffer – gare au spoiler !

La commune comme territoire psychogéographique

Melmoth furieux se passe dans les rues d’un territoire réel, le quartier de Belleville, entre la Place des Fêtes et Ménilmontant sur une surface qui pourrait correspondre à l’ancienne commune d’avant l’annexion de 1860. Ce quartier choisi comme cadre narratif est une réalité sociale (lieu de mixité forte), géographique (puisqu’elle est une colline) autant qu’historique (dernières défenses de la commune de Paris en 1871). C’est une réalité multispécifique, un tissu social, associatif, politique, un écosystème de rapports non-marchands que l’on peut appeler « commune », en faisant référence autant à la commune historique révolutionnaire (représentante d’une alternative politique radicale) qu’au territoire de résistance réellement existant et contemporain : « la commune n’est pas qu’une idée, ou même une démarche politique, c’est une vie. » (p.145)

Plus qu’un décor, cet environnement comprenant à la fois des lieux et des liens, est le terrain quasi- anthropologique d’où s’invente…

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Auteur: lundimatin