Menace nucléaire : « Le risque d'escalade est sérieux »

Patrice Bouveret est le directeur de l’Observatoire des armements, centre d’expertise indépendant et membre de l’Ican, la campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (prix Nobel de la paix 2017). L’Observatoire a publié plusieurs études sur les conséquences des essais nucléaires.


Reporterre — Le président russe, Vladimir Poutine, a réaffirmé que son pays disposait de « moyens de destruction divers » et qu’il n’hésiterait pas à les utiliser si « l’intégrité territoriale » du pays était menacée. Le président étasunien, Joe Biden, parle d’un risque « d’apocalypse nucléaire » et compare la situation actuelle à la crise des missiles de 1962. Pour quelle raison ?

Patrice Bouveret — En 1962, en pleine Guerre froide, et à la suite de la tentative américaine d’invasion de l’île, les Soviétiques ont voulu installer des missiles nucléaires à Cuba, pour les mettre au plus près des États-Unis, et pouvoir éventuellement s’en servir contre eux. La tension est montée entre l’URSS et les États-Unis, avec des risques de dérapage de tirs nucléaires.

En comparant la situation actuelle avec ce moment-là, Joe Biden donne un signal à Vladimir Poutine : si la Russie décidait d’utiliser une arme nucléaire tactique, les États-Unis riposteraient de manière immédiate et équivalente.

La comparaison avec la crise de 1962 est pertinente pour créer une pression, dans le but qu’une négociation soit menée avec Vladimir Poutine. La crise de Cuba ne s’est pas terminée en guerre car il y a eu des négociations entre les Américains et les Soviétiques. Cela a abouti au retrait des armes nucléaires soviétiques à Cuba, et au démantèlement d’armes nucléaires américaines en Turquie et en Italie. Joe Biden fait donc ce parallèle pour dire à Vladimir Poutine : « Il serait peut-être temps qu’on négocie, et que vous vous retiriez de l’Ukraine. »

Estimez-vous que le risque d’escalade est sérieux ?

Oui, dans la mesure où Vladimir Poutine n’arrive pas à obtenir ce pour quoi il a lancé cette guerre [les forces armées russes subissent actuellement une série de revers en Ukraine]. S’il se retrouve acculé, il peut vouloir essayer de frapper un coup de manière plus forte, en utilisant une arme de destruction massive. Pour le moment, ses déclarations montrent surtout qu’il est prêt à utiliser des armes nucléaires, et qu’il ne veut pas se retirer de cette guerre.

Vladimir Poutine instrumentalise donc les risques que représente l’utilisation…

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Auteur: Justine Guitton-Boussion Reporterre