#MeToo dans l’espace : les risques de violences sexuelles loin de la Terre sont bien réels

Nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère d’exploration spatiale. La NASA veut envoyer la première femme et la première personne de couleur sur la lune d’ici la fin de l’année 2025, et envoyer un équipage sur Mars pour une mission d’un an et demi dans les années 2030.

Pour veiller à ce que ce voyage vers les frontières de l’infini soit sécuritaire et plaisant, les agences nationales comme la NASA et des entreprises privées comme SpaceX doivent prendre en considération les facteurs techniques et humains associés au travail et à la vie dans l’espace. Or, les réalités de la sexualité et de l’intimité dans l’espace sont passées largement sous silence.

Comment les gens pourront-ils vivre pendant des périodes prolongées dans les conditions extrêmes d’isolement et de confinement qui sont celles des engins spatiaux et des autres planètes ? Comment géreront-ils le fait de tomber en amour, d’avoir des relations sexuelles ou d’entamer des relations et d’y mettre fin dans de telles conditions ? Comment composeront-ils avec le stress, le choix limité de partenaires intimes et les enjeux relatifs au consentement ? Comment le harcèlement sexuel ou l’agression sexuelle seront-ils prévenus ou combattus ?

Le 15 octobre 2017, #MeToo (#MoiAussi) a marqué le début d’un mouvement de protestation mondial contre le harcèlement sexuel et l’agression sexuelle. En tant que chercheurs examinant les facteurs humains dans l’espace et la sexologie spatiale – l’étude de l’intimité et de la sexualité loin de la Terre –, nous estimons qu’il est temps d’envisager l’avenir de #MeToo dans l’espace.




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Agression sexuelle et recherche spatiale

Le 3 décembre 1999, Judith Lapierre, une infirmière et chercheure en médecine sociale canadienne, embarque à bord d’une réplique de la station spatiale Mir, à Moscou, pour une expérience de simulation de 110 jours. Judith Lapierre est la seule femme parmi un équipage de huit personnes.

Un mois après le début de l’étude, le commandant en chef russe évoque l’idée de tenter une expérience dans le cadre de laquelle Judith Lapierre serait traitée comme l’objet sexuel de l’équipage. Au réveillon du jour de l’An, il déclare qu’il est temps de « réaliser l’expérience », attrape Judith Lapierre et l’embrasse de force, bien qu’elle lui demande d’arrêter à plusieurs reprises.

Judith Lapierre avertit l’Agence spatiale canadienne et avise son commandant d’équipage autrichien, qui exhorte immédiatement les dirigeants locaux et internationaux à prendre des mesures.

Lors d’entrevues auprès des médias à la suite de son expérience, Judith Lapierre confie qu’elle s’attend à pouvoir profiter d’un environnement de travail sécuritaire, exempt de harcèlement et de violence. Pourtant, certains organes de presse russes lui rejettent la faute tout en donnant une fausse image d’elle, la présentant comme une personne déprimée et la source de problèmes n’ayant aucun rapport, notamment une altercation physique entre des membres russes de l’équipage.

L’agression survenue lors de l’expérience de simulation est minimisée et attribuée à des différences culturelles. Par la suite, la carrière de Judith Lapierre dans le secteur spatial devient un combat incessant, et ce, parce qu’elle s’est exprimée.

Comme elle l’explique dans le film Last Exit : Space réalisé en 2022 par Rudolph et Werner Herzog :

Quand cette mission a pris fin, cela a vraiment eu une incidence considérable sur ma carrière tout entière. Je pensais pouvoir amorcer mon projet de recherche au sein de l’agence spatiale ou une carrière dans mon domaine, mais j’ai été complètement évincée du système.

Last Exit : Space explore ce que signifie la colonisation spatiale.

Autres contextes de recherche

Judith Lapierre n’est pas la seule. Des cas de harcèlement sexuel ont pu être observés dans d’autres contextes comparables aux conditions extrêmes des environnements spatiaux réels et simulés.

Dans un rapport de 2022 commandé par la Fondation nationale des sciences des États-Unis,…

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Auteur: Maria Santaguida, PhD Candidate, Psychology of Human Sexuality, Erotic Technology & Space Sexology, Concordia University