« Mieux vaut que tu ne saches pas » : les confortables revenus des dirigeants des coopératives agricoles

Des agriculteurs au bout du rouleau, qui peinent à dégager de quoi vivre en dépit de journées de travail harassantes. C’est une des conséquences, terrible, du système agro-industriel, qui ruine la terre et les humains. Mais ce système compte aussi des gagnants, notamment du côté des coopératives agricoles. À leur tête : des conseils d’administration composés d’agriculteurs, et des dirigeants salariés, grassement rémunérés. Jamais révélées aux agriculteurs membres des coopératives, pas plus qu’aux salariés, les rémunérations des dirigeants n’ont rien à envier à ceux de certaines grosses multinationales. Elles expliquent en partie pourquoi le système mortifère de l’agro-industrie perdure.

11 500 euros : c’est le revenu moyen mensuel des dix personnes les mieux payées en 2020 au sein d’Eureden, l’une des plus grosses coopératives agricoles de France (20 000 membres), dont le siège social se situe dans le Finistère, en Bretagne. Au sein de Triskalia (qui a fusionné avec d’Aucy en 2020 pour donner Eureden), le top 10 des salaires était encore plus important : 16 382 euros par mois, en moyenne (en 2019), en augmentation de 26 % depuis 2017. « Ces chiffres, certes très élevés, ne sont pas vraiment représentatifs, estime Serge Le Quéau, membre de l’Union syndicale Solidaires Bretagne et engagé aux côtés des salariés du secteur agroalimentaire depuis une quinzaine d’année. En faisant la moyenne, on masque les plus hauts de ces salaires, notamment ceux des DG, sans doute encore plus impressionnants. »

Parmi les suppléments que l’on peut ajouter aux rémunérations des dirigeants : un bonus annuel, qui peut aller jusqu’à plus de 20 % du salaire. Un directeur des ressources humaines (DRH) licencié en 2010 de la coopérative Triskalia touchait par exemple 26 000 euros de prime annuelle pour un salaire d’environ 100 000 euros, soit 25 % de son salaire, déjà très confortable. En 2018, un sondage réalisé par le mouvement des cadres dirigeants de la coopération agricole (le Dirca) auprès de 150 personnes (dont 60 % de directeurs généraux) révélait que onze d’entre eux émargeaient à plus de 200 000 euros par an, dont quatre à plus de 250 000 et un à près de 350 000 euros. La palme des rémunérations auxquelles basta! a eu accès revient à un ancien directeur général de la coopérative bretonne Le Gouessant, qui réunit 4000 agriculteurs. Embauché de 1987 à 2010, ce DG touchait au moment de son départ en retraite, 950 000 euros par an –…

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Auteur: Nolwenn Weiler, Sophie Chapelle