Le Gabion : voilà un livre qui se libère d’à peu près tous les attendus de l’époque en les prenant littéralement au sérieux par la voie qui conduisit parfois à ce qu’il y a de mieux en poésie : une désinvolture populaire et savante. De la science-fiction, donc. Du politique, naturellement. Du genre, on ne peut plus fluide. Et la question de la langue, celles qu’on parle, celles qu’on entend, celle qu’on subit : « J’ai de l’affection pour ces trobars-zombies, parce que j’ai entendu cette langue d’amor parfois prononcée par mes aïeux, mais si je dois choisir une langue idéale, c’est celle de mon enfance, une langue construite par un mélange de plusieurs langues, un mélange d’argot, de mots inversés, d’inventions, d’abréviations, de mots anciens, de répétitions, de règles collectives. Une langue conçue pour résister au pouvoir, jeune, belle et éphémère, si éphémère que je ne la parle presque plus, à part avec certains amis rescapés de cette époque. C’est à cause de la perte de cette langue que j’écris, que je veux mettre la langue en y. »
Nathalie Quintane : Le Gabion est un livre de SF expérimental, tu dirais ça ? Quel genre pour ce livre stylé et sans genre ?Théo Robine-Langlois : Stylé et Sans genre, c’est pas mal, j’aimerais bien qu’on laisse mes textes tranquilles par rapport à ces questions, qui en plus sont des constructions assez récentes par rapport à l’histoire de la littérature. Par contre, pour rire, je crois que j’aime bien dire que c’est de la poésie à des personnes qui ne peuvent pas du tout l’envisager comme de la poésie, parce que la poésie permet de pirater mon addiction à la narration, et de remettre en jeu les fictions qui ont de l’emprise sur moi et que je subis (l’argent, l’état, le travail, la réussite, le storytelling, le genre, l’amour…) pour arriver à m’en sortir un peu… Et du coup ça me fait dire que oui c’est de la poésie, oui c’est de la science-fiction, oui c’est une chanson de geste, oui c’est un roman graphique, « si ça te fait plaisir danse sur ma zik ». L’ennemi du Gabion, c’est la ’corpation’… c’est bien ça ? Que peux-tu nous dire de la corpation ?C’est plus une sorte de pseudo-gouvernement. Pour le mot, je voulais rapprocher corporation encore plus de l’idée de corps en enlevant or, et créer un mot qui parle du mouvement d’un corps de reptile. Aussi avant tout c’est un logo, je voulais intégrer ce genre d’usage de la langue au texte,…
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Auteur: lundimatin