Mort de Morgan Keane : le procès de la chasse ?

Il est 9 heures, à Cahors, le 17 novembre. Dans le palais de justice règne l’atmosphère pesante des procès qui font date. Les caméras se bousculent pour immortaliser la scène. Celle d’un homme à peine camouflé par son masque chirurgical, immobile et silencieux sur le banc des accusés. Fils d’agriculteur, Julien Féral, 37 ans, comparaissait devant le tribunal judiciaire de Cahors pour l’« homicide involontaire » de Morgan Keane. À ses côtés, un autre prévenu, Laurent Lapergues, 51 ans, également poursuivi en sa qualité de directeur de la tragique battue aux sangliers à l’origine du drame.

Le 2 décembre 2020, Morgan Keane, enfant du pays lotois, coupait du bois dans son jardin lorsqu’une balle de fusil l’a transpercé au thorax. Il s’est effondré et, au terme de longues minutes d’agonie, est décédé. L’auteur du tir, Julien Féral, participait avec une quinzaine de camarades à une journée de chasse, autorisée la veille par arrêté préfectoral. Si sa culpabilité ne fait aucun doute — lui-même ayant reconnu les faits dès le premier jour —, les proches de la victime espéraient la reconnaissance du partage des responsabilités : « Ce n’est pas un individu qui a tué Morgan, insiste son amie, Léa Jaillard. C’est tout le système qui pose problème. »

« Je la mets en joue, pensant que c’était le sanglier »

Chemise noire et contours de barbe bien soignés, Julien Féral s’avance à la barre et retrace le fil des événements. Ce jour-là, en plein confinement, le beau-frère de l’Aveyronnais l’a invité à une battue aux sangliers dans le département voisin. En 2018, la fillette de sa compagne a été mortellement percutée par un conducteur ivre et l’homme peine à faire son deuil. « J’avais besoin de décompresser, de m’aérer la tête, murmure-t-il d’une voix frêle. J’aime la nature, alors j’ai accepté. » Six mois plus tôt, il a passé son permis de chasse, mais n’a encore jamais appuyé sur la détente.

Dès les premières traques, le jeune marié multiplie manquements et infractions. Poursuivi par les chiens, un sanglier jaillit de la forêt. Julien Féral vise l’animal, tire à quatre reprises mais manque sa cible, ce qui lui vaut les ricanements de ses compagnons. « Partout autour, il y avait des maisons ou des routes. C’est un miracle qu’il n’y ait pas eu d’accident à ce moment-là », grommelle dans son micro Philippe Clarissou, le président du tribunal.

Puis, vient l’heure de l’accident. Il est bientôt 17 heures,…

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Auteur: Emmanuel Clévenot Reporterre