Mouvement ouvrier et cinéma d'horreur. Aux origines : du gothique au romantisme — Jacques FRANJU

Le gothique désigne à l’origine des vestiges architecturaux de l’époque médiévale anglaise [1]. Un temps oublié et moqué, il devient au cours du XVIIIème siècle de plus en plus apprécié, notamment par les artistes et certains membres de la haute société qui trouvent de la mélancolie dans les ruines. En même temps que cette recherche d’architecture médiévale anglaise se développe une redécouverte des romans de chevalerie. Ces histoires, à l’instar des légendes de la Table ronde, font souvent appel au fantastique, à la tradition et aux nobles élans de l’âme. Elles sont peu en adéquation avec les idées des Lumières et la vénération pour l’art grec de l’époque. Tout naturellement, ce mouvement de retour sur le passé anglais se fait en antagonisme avec le mouvement philosophique en cours en Europe, qui se moque des clichés et des croyances ridicules d’un autre siècle. Pour les Lumières, ces histoires sont surfaites et pleines d’idioties. Les œuvres réalistes et à portée pédagogique sont préférées car il est d’avis qu’elles permettent davantage l’avènement d’un monde de raison. Paradoxalement, les grands noms de la littérature gothique ne vouent pas une haine à la littérature raisonnable, mais ils la trouvent trop limitante en termes d’imagination et ne laisse les lecteurs que face à une énième vision d’eux-mêmes.

La première grande œuvre du roman gothique s’appelle Le château d’Otrante de Horace Walpole (1764). Ce dernier était un grand amateur d’architecture gothique, et avant de rédiger son ouvrage, la maison qu’il avait fait construire à Strawberry Hill était déjà dans cette veine architecturale. L’histoire se déroule dans le château d’un comte, Manfred, dont le fils vient de mourir de la suite d’une chute d’un casque géant tombé du ciel. En effet, l’un des ancêtres de Manfred a obtenu le château par la ruse et, depuis, une malédiction poursuit la famille. En raison de certaines implications politiques, Manfred décide d’épouser Isabella, la fiancée de son fils. Mais les évènements seront perturbés par une série d’incidents étranges comme l’apparition de membres surdimensionnés, des fantômes et du sang. Les plans machiavéliques de Manfred pour éviter la malédiction familiale seront ruinés par lui-même lorsqu’il assassinera par mégarde sa propre fille.

L’auteur du Château commence à écrire son œuvre au moment où sa famille subit des problèmes politiques et qu’il a besoin de s’évader. Etant donné que le…

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Auteur: Jacques FRANJU Le grand soir