Nation(s) et monarchie au Royaume-Uni. À propos de Tom Nairn

Théoricien marxiste écossais majeur, Tom Nairn vient de décéder à l’âge de 90 ans. Ses travaux sur les nationalismes au sein du Royaume-Uni et sur la monarchie, souvent en lien avec ceux de Perry Anderson, ont été au centre de débats et de polémiques marquantes dans l’histoire de la pensée sociale et de l’historiographie britanniques à partir des années 1970. Cette contribution revient sur son livre le plus connu (avec The Break Up of Britain, 1977) : The Enchanted Glass: Britain and its Monarchy (1988).

La reine Elizabeth II est morte. À la suite de son décès, le 8 septembre 2022, son fils est devenu automatiquement le nouveau monarque du pays, le roi Charles III. Le Royaume uni a ainsi acquis un nouveau souverain, qui sera couronné en mai 2023.

La Reine est morte, vive le Roi !

Le régime du royalisme national qui règne sur le territoire comprenant l’Angleterre, l’Écosse, le Pays de Galles et l’Irlande du nord, est un animal historique paradoxal. Site de la première révolution européenne, instigateur du développement capitaliste et des idées politiques modernes – sa caractéristique saillante parmi les pays comparables d’Europe ou de l’Amérique du Nord reste, cependant, la qualité archaïque et prémoderne de son État. 

Sans Tom Nairn, né à Fife en Écosse en 1932, cette formation sociale serait restée une véritable boîte noire. La conjoncture exige que nous revenions sur sa pensée. Diplômé en philosophie à l’université d’Édinbourg en 1956, il passera plusieurs années à la Scuola Normale Superiore de Pisa, où il découvre Gramsci ; en 1962, il co-fonde, avec Perry Anderson, la revue britannique pionnière de critique marxiste, la New Left Review (NLR).

Pôle incontournable de la troisième génération d’historiographie marxiste britannique, la NLR effectue très tôt une rupture avec l’approche dominante dans cette école, l’ « histoire par en bas » associée à la figure de Edward Palmer (E. P.) Thompson. Au contraire de leurs ainés, Nairn et Anderson proposent d’analyser l’histoire de leur pays au prisme de l’histoire de son État.

Les thèses de Nairn et d’Anderson

À travers une série d’articles dans la NLR au cours des années 1960s, les deux auteurs établissent les fondements desdites « thèses Nairn-Anderson » : une théorie du développement historique « anormal » de l’État britannique et de la manière dont ce processus détermine la formation sociale « britannique » en générale. Ils mobilisent des concepts gramsciens,…

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Auteur: redaction