Ni écologie ni société

Après un été caniculaire qui a encore une fois affolé les baromètres de l’urgence, certains intrépides n’hésitent pas à appeler cette période « l’automne chaud », projetant ce qu’il leur reste d’espoir dans la conjonction entre la sempiternelle date de rentrée de la gauche (grèves dans les raffineries, lutte contre l’inflation) et l’appel à soutenir la lutte contre un nouveau projet de méga-bassines dans les Deux-Sèvres. En cette époque du « en même temps », une formule consacrée émerge de nos souvenirs : « Fin du monde, fin du mois, même combat ! »

Ce slogan retentissait encore il y a peu dans nos rues jusqu’aux Champs Élysées où les Gilets Jaunes arrachaient de la force à cette phrase cyniquement prononcée par Nicolas Hulot, ministre de l’Environnement. Aujourd’hui sa force s’est émoussée. Elle s’est même retournée contre les luttes et a retrouvé sa fonction initiale, gouvernementale. Nous assistons à la construction d’un nouvel écrin pour les luttes, faisant tenir côte à côte, séparées mais ensemble, les deux catégories de pacification massive : le social – qui a maintes fois prouvé sa pertinence pacificatrice – et maintenant l’écologie, nouveau fourre-tout anesthésiant.

La civilisation est arrivée à un perfectionnement exquis dans sa production de subjectivité aliénée. L’absence au monde qu’elle parvient à insuffler a atteint un nouveau stade. Parvenue jusqu’ici à faire passer toute expérience de communauté comme criminelle, tout partage d’usage comme terroriste, elle avait réussi à faire accepter la question de l’organisation de la solitude – le social – comme une question extérieure, hors-de-nous. Dans le processus de civilisation du monde, l’emprise sur les êtres et les choses est inséparable de l’emprise sur les questions. Ainsi, dans sa quête éternelle de raffinement, il lui est nécessaire de soustraire une autre question aux habitants du désastre : la question écologique. Qui est en réalité toujours la même – la question de son rapport au monde – mais qu’il convient de continuellement diviser, maintenir séparée, détruire morceau par morceau, réduite à n’être que le parquet de l’individualité. L’écologie comme ultime séparation où les choses n’ont plus qu’à s’empiler sans jamais se rencontrer, sans plus jamais résonner.

L’époque accouche d’un nouveau tyran, fruit de la réunification de ces deux domaines séparés : L’ECOLOGICO-SOCIAL.

La production de l’individu est inséparable…

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Auteur: lundimatin