« Notre corps va lâcher » : les petites villes mobilisées pour les retraites

Caen, Laval, Auch, reportage

Mardi 31 janvier, la mobilisation contre la réforme des retraites n’a pas faibli dans les petites et moyennes villes : ils étaient 28 000 à Caen, dans le Calvados, 6 500 à Auch, dans le Gers ; 10 000 à Laval, dans la préfecture de Mayenne… Service public, agriculteurs et agricultrices, ouvriers de l’agroalimentaire : tous ont fait front commun. Retour sur une journée de mobilisation.

• Caen : « La retraite avant l’arthrite ! »

Sous un grand soleil, un cortège impressionnant défile à Caen, dans le Calvados, où 28 000 personnes ont répondu à l’appel de l’intersyndicale. Profs, cheminots, soignants, chauffeurs, ouvriers, retraités… Dans la ville aux cent clochers, un bouillon de colère gronde. Les métiers du service public sont abondamment représentés.

À l’ombre de l’église, Maëlle et Laëtitia, institutrices en école maternelle de 47 et 34 ans, se disent « inquiètes ». « Nous passons nos journées à ras le sol, à hauteur d’enfants, assises sur des chaises minuscules », mime Laëtitia. Sa classe compte vingt-cinq enfants. Elle les « adore », mais « ils réclament toute [son] énergie et [sa] patience ». « Quand je vois la forme de mes collègues à la retraite, je sens qu’il sera difficile de faire des années de rallonge, se soucie Maëlle. Et comme d’habitude, ce sont les femmes et leurs carrières plus courtes qui trinquent. »

Sur l’asphalte de la rue Saint-Jean, à mesure que les rangs se garnissent, les pancartes fleurissent : « La retraite avant l’arthrite ! », « Élisabeth, tu dépasses les bornes », « Ma pancarte est pourrie. Comme cette réforme »

« Pour nous, c’est une question de vie ou de mort »

En tête de cortège se trouve notamment Marie-Noëlle, une aide médico-psychologique en Ehpad, âgée de 58 ans. « Je suis à mi-temps thérapeutique, résultat de trente-trois ans à trimer », explique-t-elle d’une démarche claudicante. Son cas n’est pas isolé : « À force de porter des résidents, même les plus jeunes finissent toutes cassées. De leur bureau, les politiques ne le voient pas ! Pour nous, davantage de travail, ce sont des années en moins bonne santé. »

Cette déconnexion de l’exécutif avec sa réalité, Marie-Noëlle a tenté de s’y opposer au sein des Gilets jaunes, puis en se syndiquant à la CGT. Pourtant, malgré les piquets de grève et les manifestations, « l’État nous tape dessus sans discontinuer : les salaires, les retraites, le mépris, la répression ou son absence d’effort en matière d’écologie. S’ils n’en démordent pas, nous non plus. Pour nous, c’est une question de vie ou de mort ». Derrière elle, un fumigène…

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Auteur: Alexandre-Reza Kokabi, Emmanuel Clévenot, Scandola Graziani Reporterre