Dans son Journal à la date du 10 mars 2025, on trouve ce monologue d’Outis qu’il aurait tenu auprès d’un agent de France Travail. Est-ce de la prose à streamer, des vers libres, une confession d’un nouveau genre ou la retranscription fidèle d’un « bilan d’étape » très singulier ? Difficile à juger. Car on ne sait pas si ce rendez-vous a réellement eu lieu. Mais on doit admettre que si « l’espace toujours fuguant toujours s’ouvre à sa fugue », comme dit finalement le poète cité par Outis, il y a bien lieu de croire que tout est vrai – dans des temps différents et sous des rapports différents.
« Je connais bien cette frayeur,
j’ai identifié ce qui m’entrave : »
Dit quelque part un grand poète russe
« le ciel tombe sans s’effondrer »
Moi aussi, je connais bien cette frayeur :
Avant, j’espérais l’effondrement
Le Grand Bouleversement.
Aux meilleurs moments,
Je croyais même le précipiter !
Comme on obéit à une prophétie :
« Commune, égalité et dignité ».
Et quand je désespérais,
Je ne désespérais jamais du désespoir :
Je pariais sur l’œuvre d’un météore
Force pure et sans haine
Capable de mettre fin au monde :
L’œuvre anonyme, sans Sauveur – la vraie révolution –
Tout ensemble contingente et nécessaire
(le contraire d’une bombe nucléaire)
L’œuvre parfaite, l’œuvre de Personne…
Qui n’est plus une œuvre.
Vous comprenez ?
Mais rien de tout cela n’arrive
Nous chutons sans peur
À jamais séparés de l’horizon des événements
— Et pourtant captifs de son attraction.
C’est Lucrèce qui avait raison
Et qui a peut-être porté le coup le plus dur
À la théorie révolutionnaire :
Tout se dérobe et se désagrège
— lentement et nécessairement
Tout se délite, morceau par morceau
— sans grand bouleversement
Qu’est-ce qu’un mandat d’arrêt de la Cour Pénale…
Auteur: dev