Depuis toujours, évoquer les spectres c’est défier. Défier la mort, défier la fatalité, défier en effrayant, défier et maudire de génération en génération, hanter anonymes ou puissants, empêcher de nouveaux propriétaires de jamais dormir tranquilles, défier les clercs qui n’aiment pas les fantômes, trop magiques… Il n’est donc pas étonnant que les révolutionnaires s’en soient emparés.
Pourtant, on peut relativement bien connaître son histoire sociale et politique européenne et n’avoir jamais donné l’importance due aux fantômes qu’elle tient dans ses malles et ses greniers. Des « damnés de la terre » de l’Internationale aux poèmes de Louise Michel, des images de cadavres bondissants de la Semaine sanglante au « spectre [qui] hante l’Europe, le spectre du communisme » – incipit du Manifeste du Parti communiste – au « Je reviendrai et je serai des millions » de Spartacus, les spectres traînaient leur teint blafard et leurs imprécations sans que leur histoire soit contée. Comme s’ils n’existaient pas, dirait un irrespectueux. Les spectres communs hantent mollement alors que les fantômes révolutionnaires, c’est-à-dire politisés et radicaux, ont toujours de furieuses passions existentielles. Ils clament haut et fort qu’ils sont, qu’ils reviendront. Éric Fournier, avec son style fluide et agréable, lève le voile sur leurs surgissements et les hisse ainsi à la vie historique.
Mais de quoi parlons-nous, de quels genres de zombies est-il question ?
Les spectres sont des manifestations des morts ou d’ancêtres, auxquels commandent des forces obscures et qui viennent interagir avec les vivants, les hanter, se venger, les tourmenter ou les accompagner. Leurs variantes révolutionnaires sont les âmes errantes des insurgés et révoltés éliminés par l’armée, la police, les gouvernements, l’État.
C’est la façon dont on tue les révolutionnaires, sommairement abattus,…
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Auteur: dev