NTBLR [9/ ?]

C’est de la superposition. C’est posé par-dessus quelque chose et du coup ça le cache sur la zone où que c’est venu se superposer. C’est pas de la supposition, c’est un positionnement : quelqu’un est venu ici, sans doute plutôt à la faveur de la nuit, pour donner sa position en superposant. Quelqu’un est venu, à la faveur de la nuit, fouiller dans son sac et en sortir ce que j’imagine être un petit paquet d’une trentaine de vignettes reliées ensemble par un élastique et a posé son positionnement anonymement sur le mur.

Quelqu’un est venu, à la faveur de l’obscurité — l’obscurité lui a accordé la faveur de le rendre anonyme — et cette faveur lui a permis de venir de nuit pour décoller anonymement un petit autocollant de la taille d’une petite carte postale et la superposer sur une affiche qui avait aussi dû être posé là à la faveur d’une autre nuit par d’autres individus. C’est une certitude : quelqu’un, quelqu’un d’anonyme, mais sans doute d’assez jeune, enfin pas non plus très vieux et pas non plus très jeune, sans doute quelqu’un qui était plutôt jeune genre entre 20 et 40 à tout péter (mais je ne fais que supposer) est venu sans qu’on puisse l’identifier poser sur la place, sur un des murs qui borde la place, est venu poser son positionnement. Une position plutôt radicale, avec presque pas de mots, mais un visage assez dur, avec un cou, un torse et des bras croisés, mais pas croisés genre « restez pas là les bras croisés », mais croisés genre « monsieur propre » que tout le monde reconnaît parce qu’en fait c’est fou, mais genre tout le monde le connaît. Donc quelqu’un est venu, de nuit, sans doute pas à quarante, sans doute même peut-être tout seul ou en petit groupe, poser sur une affiche qui annonçait déjà quelque chose, mais qui l’annonçait avec des mots parce qu’on avait sans doute pas de visage assez connu pour l’annoncer. Quelqu’un est venu superposer son autocollant pour annoncer quelque chose, poser une position tellement radicale qu’elle ne nécessite pour se présenter plus de mots, mais juste un visage qui est pour le coup loin d’être anonyme. Quelqu’un est venu poser un visage archiconnu sans rien d’autre juste pour que nous le lendemain on se dise « ben merde alors y’a ce visage archi connu dans mon champ de vision ». Mais le problème de ce visage, qui formellement parlant ressemble à tous les autres visages, c’est justement que ce visage-là, ce visage nous dévisage, il nous envisage, c’est un visage qui vient avec toute la radicalité qu’il a construite autour de son…

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Auteur: lundimatin