Olivier Abel : « Avec la loi immigration, on est en train de fabriquer de l’étranger »

La Croix : Après le vote de la loi immigration, le gouvernement cherche à minimiser la rupture qu’elle représente. Ceux qui s’indignent sont accusés d’en faire trop. Quelle est votre lecture ?

Olivier Abel : Je ne sais pas si cette loi représente vraiment une rupture. Quelque part, elle est l’aboutissement d’une longue dérive par laquelle, peu à peu, les gouvernements Macron se sont rangés sous la dépendance des questions identitaires et sécuritaires du Rassemblement national (RN). Cela s’inscrit dans une tendance globale du champ politique français à l’œuvre depuis plusieurs décennies, même si elle s’est beaucoup accélérée récemment. Il y a aujourd’hui une rupture dans la conscience publique, parce que les gens se demandent soudain et à juste titre : « Où va-t-on comme cela ? » Il est clair que cette évolution tendancielle prépare l’épanouissement des thèses xénophobes et nationalistes du RN et peut nous conduire à devenir une société en guerre.

Pour le gouvernement, cette loi a été est votée pour « donner un bouclier » à la France, pour qu’il n’y ait « plus d’Arras ». Cet argument sécuritaire est-il de part en part fictif et instrumentalisé ou est-il en partie sincère ? Mais que dire alors de ce désir de sécurité ?O. A. : Je pense que notre société est obsédée par le mal. Elle ne cherche ni ne voit plus le bon. Et comme disait Emerson, « toute protection contre un mal nous tient sous la dépendance de ce mal ». On favorise tout ce qui nous protège et c’est une fausse bonne idée, car on a jamais fini d’être protégé et cette demande de sécurité devient monstrueuse. Le sentiment général d’insécurité devrait par ailleurs être mieux analysé, car je crois qu’il relève surtout d’une insécurité civilisationnelle, culturelle et presque spirituelle.

Ce qu’il nous faut, ce n’est pas plus de sécurité, c’est plus de courage pour rencontrer la…

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Auteur: Élodie Maurot