Opération « Wuambushu » : comme souvent à Mayotte, la question migratoire occulte la question sociale

L’opération « Wuambushu » lancée le 24 avril dernier par le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, a de nouveau braqué les projecteurs sur la pression migratoire à Mayotte. Cette petite île française de l’océan Indien compte près d’un habitant sur deux qui est étranger, essentiellement de nationalité comorienne.

L’action militaro-policière ainsi engagée a pour objectif la destruction de bidonvilles, l’expulsion de 10 000 étrangers en situation irrégulière et le démantèlement de bandes criminelles, établissant en creux un lien direct entre immigration et insécurité.

Cette présentation des faits – l’État va mettre de l’ordre ! – occulte la part de responsabilité que ce dernier a lui-même dans la genèse de ce désordre.

Le département français le plus pauvre et le plus inégalitaire

Ancienne colonie de l’empire français (1841-1946), l’île de Mayotte a accédé en 2011 au statut de département qu’elle réclamait depuis plus de cinquante ans.

Douze ans après, l’île offre le tableau d’une société des plus fragmentées. Le développement économique exogène porté par la création d’emplois publics profite pour l’essentiel aux métropolitains « expatriés » et à une fraction diplômée de la population mahoraise.

En 2018, le taux d’emploi était de 23 % pour les natifs de l’étranger, 38 % pour les natifs de Mayotte et 80 % pour les natifs de France métropolitaine. De fait, les inégalités entre ménages sont quatre fois plus importantes qu’en France métropolitaine et 77 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté national.

Des gendarmes français arrêtent un homme lors d’une opération de police à Dzoumogne, sur l’île de Mayotte, le 1ᵉʳ mai 2023

Des gendarmes français arrêtent un homme lors d’une opération de police à Dzoumogne, sur l’île de Mayotte, le 1ᵉʳ mai 2023.
Patrick Meinhardt/AFP

Rapporté au revenu médian calculé à Mayotte, le seuil de pauvreté se…

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Auteur: Nicolas Roinsard, Sociologue, maître de conférence, Université Clermont Auvergne (UCA)