« Oups ! une erreur est survenue. » En plus de nous indiquer que là, encore une fois, ça ne va pas marcher, ce message nous rappelle que l’erreur technique n’est pas résorbable. On ne peut pas faire sans. Au mieux, on peut l’intégrer au cours habituel des choses, en lui donnant l’apparence de la normalité. Oups, autrement dit, rien de grave.
La douce neige de l’écran de télévision d’un coup piqueté de noir et blanc, avec son bruit de friture et la soudaine remontée de la matérialité des composants, noir blanc noir blanc noir blanc… Quelque chose en nous se laissait raconter qu’elle allait fondre au soleil du progrès. Parce qu’elle était sale, cette neige, muette et pleine de bruit. Parce qu’elle faisait irruption, perturbait l’engloutissement quotidien des images. Parce qu’elle s’affichait comme ratage et erreur. Donc, on espérait pouvoir en finir avec elle – syllogisme de la modernité : c’est une tache, donc elle est lavable. Le message latent, sous l’information immédiate du fait que là ça rate une fois de plus, c’est que le progrès de la technique était encore en lutte ouverte contre ses limites internes, contre ses propres dysfonctionnements. Avec, à l’horizon, l’espoir d’une victoire définitive.
Chaque « oups ! », fermement installé dans sa petite fenêtre au design réfléchi et soigné, dit en réalité le contraire de ce qu’il annonce : une erreur n’est pas « survenue », elle ne s’est pas surajoutée comme quelque chose d’extérieur à un processus qui devrait normalement s’en passer. Elle ne constitue pas un événement, mais une normalité, puisqu’elle était prévue, avec un costume tout prêt pour entrer en scène et des manières très polies (« veuillez… plus tard… »). Loin de survenir, elle vient, simplement, de temps en temps, et re-vient, en…
Auteur : lundimatin
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