Umberto Boccioni. — « Stati d’animo II – Quelli che vanno » (États d’esprit II — Ceux qui partent), 1911
«Ingratitude » : le qualificatif est du président Emmanuel Macron, le 6 janvier dernier, lors de la conférence annuelle des ambassadeurs. Les dirigeants des pays où des soldats français sont intervenus « contre le terrorisme » depuis 2013 ont « oublié de nous dire merci », alors qu’« aucun d’entre eux ne serait aujourd’hui avec un État souverain si l’armée française n’était pas intervenue. »
« Ce n’est pas grave ; ça viendra avec le temps », n’a pu s’empêcher d’ajouter le président français, s’attirant aussitôt une réplique du maréchal Mahamat Déby – dirigeant d’un régime tchadien pourtant sauvé à six reprises par l’armée française -, fustigeant « des propos qui frisent le mépris envers l’Afrique et les Africains » ; et une autre du premier ministre sénégalais Ousmane Sonko, pour qui « la France n’a ni la capacité ni la légitimité pour assurer à l’Afrique sa sécurité et sa souveraineté ».
Lire aussi Rémi Carayol, « En Afrique, le gendarme est (presque) nu », Le Monde diplomatique, janvier 2025.
Les deux pays ont tenu à faire savoir que l’évacuation des militaires français était due à leur décision souveraine, et non à celle de Paris. Du côté français, on précisait cependant que le Tchad et le Sénégal n’étaient absolument pas visés par les propos du président Macron, qui ciblaient les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES). Mais le capitaine Ibrahim Traoré, chef de la junte du Burkina Faso, pays membre de l’AES justement, s’est également senti visé par Macron : « Il a insulté tous les Africains. (…) Voilà comment ce monsieur voit l’Afrique, voit les Africains, a-t-il affirmé lors d’une cérémonie de vœux lundi 13 janvier : Nous ne sommes pas des humains…
Auteur: Philippe Leymarie