Parcoursup et la police prédictive

Quoi de commun entre la police prédictive et Parcoursup ? Les deux reposent sur des algorithmes, certes, mais ils sont surtout deux outils plus ou moins subtils du contrôle social assisté par ordinateur. À chaque fois, l’algorithme incarne une somme de décisions politiques dont l’importance n’a d’égale que l’opacité : tout repose alors sur l’efficacité opérationelle, l’interface, la baisse du taux de criminalité ou la répartition des élèves dans les filières en fonction de leurs choix. Une fois n’est pas coutume, les causes structurelles ou les déterminations collectives sont converties et neutralisées en décisions individuelles.

« J’ai pris une Gorgée de Vie –
Je vais vous dire ce que j’ai payé –
Très exactement une existence –
Le prix du marché, ont-ils dit.

Ils m’ont pesée, grain par grain de poussière –
Ont pris la mesure de chaque Particule,
Puis m’ont remis la valeur de mon Être –
Une Goutte de Paradis, une seule ! »
Emily Dickinson

Quel est le sens de la vie ? Qu’est-ce que le destin ?

Voilà des questions avec lesquelles beaucoup d’élèves arrivent en cours de philosophie en terminale. La plupart du temps, les philosophes sont incapables de donner à ces questions des réponses satisfaisantes. Les élèves partiront à la fin de l’année, sans réponses, mais avec des questions polies et affûtées.

Et pourtant… pour être tout à fait honnêtes, ne devrions-nous pas leur dire que les réponses à ces questions existent déjà ? Que désormais, ces questions sont obsolètes ? Qu’il y a des algorithmes qui ont pour charge de nous décharger du poids de notre destin. Laissez faire le pilote automatique, tous les choix ont déjà été faits pour vous.

En réalité, cela n’a pas attendu les algorithmes ou Parcoursup pour commencer. Certains disent que c’est le cas depuis longtemps, algorithmes ou pas :

« Ces instruments ne sont pas des moyens mais des « décisions prises à l’avance  » : ces décisions, précisément, qui sont prises avant même qu’on nous offre la possibilité de décider. Ou, plus exactement, ils sont la décision prise à l’avance. »

Aux États-Unis, une de ces décisions a été prise avec la généralisation des logiciels de police prédictive : les données sur le crime sont utilisées pour construire des modèles de prévision qui permettent de savoir qui risque de devenir un criminel et où risquent de se produire les prochains crimes. Les algorithmes analysent le passé pour anticiper l’avenir, et prévenir le…

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Auteur: lundimatin