Passe Sanitaire, conspirationnisme et luttes sociales

Une interview du collectif Wu Ming par Federica Matteoni pour la revue allemande Jungle World. (25-28 octobre 2021, notes de WM ajoutées les 4 et 5 novembre, notes du traducteur signalées par NdT)

La manifestation du 8 octobre dernier à Rome, avec l’assaut du siège de la CGIL, semblait avoir confirmé aux yeux de l’establishment politique que l’opposition au Passe Sanitaire était exclusivement fasciste. Et il était indéniable que la droite, extrême ou pas, s’était conquis des espaces sur le terrain de la protestation contre la gestion de la pandémie. Puis, à l’improviste, les choses ont changé, mais avant de raconter ça, expliquez-nous pourquoi d’après vous la description d’un mouvement anti-green pass essentiellement fasciste est fausse.Dès le printemps 2020, nous avions prévenu que la colère sociale augmentait et qu’elle exploserait une fois diminuée la peur du virus. Nous avons dit que le déficit de critique de la gestion gouvernementale de la pandémie transformerait l’inévitable protestation en quelque chose de très confus, d’ambigu, de manipulable par l’extrême-droite et différents conspirationnistes. Nous avons durement critiqué la majorité de la gauche mouvementiste, qui exprimait une vision « virocentrique » c’est-à-dire centrait uniquement ses discours sur le virus et le risque de contagion, en parlant très peu du fait que la gestion politique de la pandémie était irrationnelle, injuste, hypocrite et même criminelle.

Durant l’été, quand ont commencé les mobilisations contre le passe sanitaire, nous avons exprimé pour la énième fois notre opinion, en critiquant la poste hautaine de certains camarades, la facilité avec laquelle on appliquait des étiquettes, l’adhésion à la « paix sociale pandémique » du gouvernement Draghi par peur de dire « les mêmes choses que la droite », c’est-à-dire que Matteo Salvini et Giorgia Meloni, qui critiquaient le passe sanitaire mais pour des raisons opportunistes. Maintenant, il est clair que les rues sont pleines aussi de saletés sémiotiques et idéologiques. Aussi, mais pas seulement, et c’est justement ça la question.

Dans chaque mobilisation de masse, on a toujours entendu de tout : sans s’attarder sur la révolution russe de 1905 qui était au début conduite par le pope Gapone, rappelons que sur la place Tharir on entendait aussi des fantasmes de complot antisémite, à Gezi Park, on entendit aussi des fantasmes de complot nationalistes de matrice kémaliste (celle-là même qui pousse à nier le génocide…

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Auteur: lundimatin