Personnalité antiautoritaire

« Après avoir été évincé de la classe dominante, je me résolus alors à la trahir définitivement et devint membre du SDS. » Cette phrase, Hans-Jürgen Krahl la jeta à la figure de son juge au cours d’une allocution de près d’une heure en octobre 1969.

Il était poursuivi avec Günter Amendt et K.D. Wolff, eux aussi membres du SDS, pour l’organisation d’une manifestation non autorisée contre la remise du prix de la paix des libraires allemands au président sénégalais Senghor. Le juge l’avait prié de fournir ses « données personnelles ». Krahl fit ainsi le récit de sa socialisation politique qui l’avait menée de l’organisation « völkisch » des Ludendorff à la fondation de la Junge Union à Alfeld en Basse-Saxe, puis à une corporation étudiante à Göttingen. Alors qu’il croyait encore trouver sa « détermination théorique » en Martin Heidegger, il fomenta une fronde antiautoritaire contre l’un des « Anciens » et fut immédiatement exclu de la fraternité. Krahl se résolut alors en 1965 à trahir sa classe, il adhéra au SDS et se rendit à Francfort pour poursuivre ses études.

Il commença là-bas une thèse sous la direction de Theodor W. Adorno qui allait le marquer profondément. L’influence de son professeur est manifeste, lorsqu’il déclara devant le tribunal qu’il serait sardonique de parler encore de quelque chose comme de la personnalité face au déclin de l’individu bourgeois. C’est pourtant dans les réflexions stratégiques sur la lutte des classes qu’il avait exposées devant ce même tribunal qu’il prit fondamentalement ses distances à l’égard d’Adorno. Alors que ce dernier tenait la pratique pour trompeuse et qu’il avait fait le choix de la théorie pure, son élève réfléchissait en permanence aux conditions d’émancipation actuelles dans son travail théorique — et ce même lorsqu’il était question de la théorie de la valeur, de la dialectique ou…

Auteur: lundimatin
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