« Il faut venir sur le parking, c’est terrible de les entendre meugler dans leur camion et parfois même en plein soleil. » Jean* travaille pour la compagnie de transport maritime Brittany Ferries et souhaite rester anonyme. Depuis le mois de mars, son employeur a de nouveaux passagers sur ses bateaux qui font la liaison entre Rosslare, en Irlande, et Cherbourg, dans la Manche : des veaux, transportés par centaines, très jeunes, certains non sevrés.
Jean ne travaille pas directement sur la seule ligne de la compagnie concernée par cette pratique. Mais cet employé a assisté à plusieurs « déchargements » des animaux dans le port normand. « Personnellement, je ne suis pas fou de joie de voir le trafic de viande vivante, confie-t-il. Je sais que les veaux sont dirigés vers Montebourg [à une vingtaine de kilomètres de Cherbourg, ndlr] où il y a un hangar pour les faire sortir des camions et les abreuver, avant de repartir ailleurs. »
La compagnie maritime bretonne n’est pas la seule à transporter des animaux vivants, mais elle se trouve aujourd’hui dans le viseur de plusieurs associations. Car il s’agit là d’une reprise de cette activité, après une pause d’une trentaine d’années. La Brittany Ferries répond ici à une logique de marché de l’agro-industrie, quitte à transporter des veaux à peine séparés de leur mère pour une nuit entière de bateau, pour être envoyés ensuite à l’engraissage, par camion à l’autre bout de l’Europe.
Une pratique interdite en Grande-Bretagne
En 2019, plus de 14 000 moutons sont morts lors du chavirage d’un cargo au large du port de Midia, en Roumanie. En 2021, 2600 jeunes bovins sont abattus après trois mois de traversée et d’errance en Méditerranée. Le cargo et son chargement avaient été refoulés de leur port de destination en Turquie et de tous les autres ports de la région.
Quand le transport d’animaux vivants pour l’agriculture fait la une de la presse,…
Auteur: Guy Pichard