Petite histoire de xénophobie ordinaire

Je sais à quel point les mots qui suivent peuvent sembler inoffensifs. Ils décrivent une toute petite mésaventure qui n’a provoqué aucune blessure profonde, qui n’aura aucune conséquence douloureuse. Pourtant, quelque chose me donne envie de vous la raconter.

Lorsque notre fille est née, Marion et moi avons fait la demande d’un livret de famille. En allant chercher le document, Marion s’est rendu compte qu’il avait une particularité : il mentionnait le fait que l’enfant avait été reconnu par son père et sa mère mais seul le nom de la mère figurait dans les pages destinées à établir l’identité des parents. Étonnée, elle a demandé des explications. Laissant entendre que « ça arrivait souvent », l’employée de la mairie lui a conseillé de vérifier que j’avais bien obtenu ma naturalisation.
Lorsque Marion m’a fait part de cette conversation, je me suis rendu à la mairie, muni de mon passeport et ma carte d’identité, pour demander pour quelles raisons on doutait de mon état civil. On m’a répondu que c’était « Nantes » (c’est-à-dire le Service Central d’État Civil) qui avait refusé de confirmer ma naturalisation et que c’était moi qui devais obtenir un extrait d’acte de naissance où figurerait la date précise à laquelle je suis devenu français.
J’ai osé demander, fort, pour que tout le monde m’entende, si ce n’était qu’auprès de « Nantes » qu’ils forçaient des citoyens à faire eux-mêmes cette démarche ou si des Français nés dans d’autres contrées à la réputation douteuse – Sarcelles, Agen, Châteauroux, que sais-je – avaient eux aussi droit à un traitement spécial.
Personne n’a jugé nécessaire de me répondre.

Ayant obtenu le document requis, je suis retourné à la mairie où, dans un premier temps, on m’a dit que la personne qui s’occupait des livrets de famille n’était pas là. Comme j’insistais, on est allé chercher une employée « supérieure » qui m’a dit qu’il fallait que j’envoie moi-même le livret de famille à Nantes pour qu’ils y ajoutent mon nom. Ne comprenant pas dans quel but on m’avait demandé d’abord d’apporter la preuve, déjà nantaise, de ma naturalisation, pour me demander ensuite de faire cette nouvelle démarche, j’ai demandé si cette manière de traiter les étrangers lui semblait correcte. Elle m’a répondu, à raison, que je n’étais pas étranger : juste un Français né à l’étranger.
Insistant un peu pour savoir exactement pourquoi, alors qu’ils avaient envoyé le…

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Auteur: lundimatin