Peut-on déjà faire confiance à l’IA pour diagnostiquer un cancer ?

Quelle sera demain la place de l’intelligence artificielle (IA) en médecine ? Les problèmes diagnostiques pourraient-ils être résolus non plus par un Dr House mais par son alter ego numérique ? Dans les faits, l’IA dépasse déjà l’œil dans la détection de certaines tumeurs à partir d’images radiologiques (mammographies, IRM)… Ce qui a fait dire à certains que les ordinateurs allaient sous peu remplacer les experts humains.

Mais, contrairement à ces prédictions, le radiologue n’a pas disparu : au contraire, une « collaboration » inattendue s’est mise en place entre lui et la machine qui devait prendre sa place. Le premier travaillant à canaliser les capacités et points forts de la seconde afin d’améliorer interprétation et diagnostic au bénéfice des patients.

Cette question de l’aide au bon diagnostic est centrale, et vaut tant en psychiatrie où l’IA fait également ses premiers pas qu’en cancérologie… En anatomie pathologique, soit « l’examen des organes, tissus ou cellules pour repérer et analyser des anomalies liées à une maladie (cancers, etc.) », les perspectives et les promesses sont énormes.

L’IA est-elle déjà capable de telles analyses ? Pourrait-elle se révéler plus performante que l’expert humain ?

Les incompréhensions et les confusions abondent, et il est important de comprendre pourquoi. C’est ce point que nous vous proposons ici.

Ce qui a permis les premiers pas de la « pathologie numérique »

Pour l’IA, comme pour tout spécialiste humain, le diagnostic repose, entre autres, sur un objet aussi simple qu’incontournable : les lames de verre où le médecin pathologiste dépose une très fine « tranche » du tissu à analyser (poumon, foie, etc.), afin de l’observer au microscope.

Une lame de verre est déposée sur un microscope pour observation

Les coupes, très fines, de tissus biologiques ou organes sont à la base de tout examen en cancérologie pour identifier la nature de la pathologie.
Murat/Shutterstock

Par cette analyse microscopique, le médecin pathologiste peut identifier différents types de cellules, comparer leurs formes ou encore leur organisation spatiale (architecture) pour identifier des amas anormaux – tumoraux par exemple.

La numérisation en masse de ces lames a ouvert la voie à l’utilisation de l’IA en anatomie pathologique. L’avènement de scanners adaptés permet, dans un nombre croissant d’hôpitaux, l’acquisition et le stockage des lames de microscopie sous forme numériques. Les lames d’origine sont toutefois conservées… ce qui ne sera pas forcément possible pour l’intégralité de leurs versions numérisées, du fait du coût de stockage.

Cette procédure, qui ouvre la voie à la « pathologie numérique », a permis de travailler à des algorithmes destinés à réaliser leur analyse de façon automatisée. Avec pour objectif que l’IA puisse assister le pathologiste dans son diagnostic. Elle lui est aussi utile pour des raisons ergonomiques et de gain de temps.

Infographie montrant le parcours des lames de microscopie, du microscope aux réseaux de neurones artificiels et algorithmes de traitement de l’information

Les lames de verre sont traditionnellement observées au microscope. Elles peuvent désormais être numérisées pour être étudiées sur un écran d’ordinateur. Ce qui permet également de les transmettre à des réseaux de neurones artificiels.
DR, Fourni par l’auteur

Mais comme l’humain, la machine (le plus souvent des réseaux de neurones artificiels) doit être formée. En premier lieu, elle doit être capable de « regarder » les lames et de comprendre ce dont il s’agit. Cette analyse utilise la technologie de reconnaissance de formes comme technique de base.

En second lieu, elle doit pouvoir interpréter ce qu’elle « voit ». L’IA repose sur la notion d’apprentissage et la capacité d’inférer, c’est-à-dire de transférer les connaissances acquises lors de sa formation et de son entraînement à d’autres situations, comparables mais non similaires : par exemple, reconnaître une micrométastase (amas de quelques cellules tumorales pouvant passer inaperçues) ganglionnaire de cancer du sein en ayant vu au préalable d’autres images de métastases.

Il est à noter que les lames numérisées renferment beaucoup plus de pixels que des images radiologiques et contiennent des milliers de cellules – elles sont donc particulièrement riches en informations que…

La suite est à lire sur: theconversation.com
Auteur: Audrey Rousseau, Professeur en Anatomie Pathologique – Médecin enseignant-chercheur au CHU d’Angers, Université d’Angers