Polémiques autour du déjeuner présidentiel : l'impossible autocritique

Un mot, pour commencer, des dix journalistes sélectionnés par l’Élysée. Sans trop de surprise figurent dans la liste des professionnels influents : ceux qui disposent d’un pouvoir éditorial dans leur rédaction (éditorialistes, chefs de service politique, rédacteurs en chef, intervieweurs) ; ceux qui accaparent de ce fait la parole dans d’autres médias que le leur, notamment dans l’audiovisuel (émissions de commentaire, éditos radiophoniques, interviews politiques) ; ceux qui, enfin, ne ménagent pas leurs efforts pour assurer le SAV des réformes libérales les unes après les autres. Ainsi va le pluralisme dans les médias dominants… et ainsi en profitent les chouchous du président : Françoise Fressoz (Le Monde), Guillaume Tabard (Le Figaro), Dominique Seux et Cécile Cornudet (Les Échos), David Revault d’Allones (Le Journal du dimanche), Stéphane Vernay (Ouest France), Nathalie Saint-Cricq (France Télévisions), Benjamin Duhamel (BFM-TV), Yaël Goosz (France Inter) et Alba Ventura (RTL).

Que les choses soient claires : ces professionnels n’ont pas ventilé les éléments de langage présidentiels sous contrainte, ni attendu, pour nombre d’entre eux, un déjeuner avec le président pour chanter les louanges de la réforme des retraites ! Pour une bonne et simple raison : tous (ou presque ?) l’approuvent, et profitent de leurs créneaux d’expression pour le faire savoir et prescrire leur opinion à cet égard.

Reste que cette opération de communication soulève trois problèmes majeurs du point de vue du journalisme, des médias français et du rapport des journalistes politiques à la parole gouvernementale :

1. La fabrique de l’agenda politique et médiatique. À la veille de la première grande journée de mobilisation, les lecteurs, auditeurs et téléspectateurs ont été invités à penser… à « ce que pense le président ». Que les éditorialistes soient louangeurs ou critiques de ses propos (nous y reviendrons…) ne change rien au problème fondamental : il suffit à Emmanuel Macron de lever le petit doigt pour que sa communication soit considérée comme une information – pour ne pas dire un « événement » – en tant que telle, et accapare aussitôt l’attention des commentateurs officiels. Peu importe que les éléments rapportés – déjà tenus par la plupart des ministres sur la plupart des plateaux, ainsi que dans la presse – relèvent d’ailleurs d’une « non-information » : il en va là du pouvoir d’agenda qu’exercent à sens unique les chefferies…

La suite est à lire sur: www.acrimed.org
Auteur: Maxime Friot, Pauline Perrenot Acrimed