Politisons la restauration écologique

L’écologie de la restauration vise à faire retourner à leur état originel des écosystèmes dégradés. En apparence simple pratique issue de l’écologie scientifique, elle recèle des enjeux politiques importants.

Prenons un exemple. La commune de Lille a mené un projet de restauration de l’habitat des abeilles sauvages terricoles. Ce projet a consisté à appauvrir les sols en nutriments afin de permettre le développement d’une flore typique des sols pauvres, capable de fournir la nourriture nécessaire aux abeilles. Les procédés d’appauvrissement des sols sont très courants en écologie de la restauration. Ils peuvent se faire par étrépage, qui consiste à enlever les horizons superficiels du sol, plus fertiles, pour laisser apparaître les horizons profonds et infertiles. Ils peuvent également se faire par des fauches successives, lors desquelles on exporte la végétation qui contient les nutriments. Ces pratiques d’appauvrissement sont justifiées par le fait que le 20e siècle a été marqué par un enrichissement généralisé des sols, dû principalement aux engrais minéraux. Même les sols non fertilisés sont concernés, puisqu’ils reçoivent les retombées atmosphériques de l’azote qui s’est volatilisé dans les champs cultivés. Cet enrichissement a conduit à des modifications majeures des populations végétales, mettant en péril les espèces spécialistes des écosystèmes pauvres.

Les prairies calcaires sont un autre exemple d’écosystème fréquemment concerné par les pratiques de restauration. Ce sont des habitats pauvres, qui concentrent une biodiversité végétale importante et qui font partie des habitats protégés au niveau européen. Les exemples les plus connus en France sont la plaine de la Crau et les causses de l’Aveyron et de la Lozère. Ce sont des habitats fortement menacés suite à la déprise agricole, qui voit disparaitre le pâturage et se réimplanter la forêt. La restauration des prairies calcaires est assurée par la mise en place de pratiques de fauche ou de pâturage extensif, avec dans certains cas des pratiques plus poussées comme des transfert de sol ou des transferts de graines.

Ces deux exemples de restauration d’écosystèmes pauvres se justifient car ils concernent l’habitat d’espèces très menacées au niveau européen. Ils posent cependant quelques questions. Les sols pauvres où nichent les abeilles terricoles sont la conséquence de 6 000 ans d’appauvrissement des sols par les pratiques agricoles. Les prairies calcaires sont la conséquence…

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Auteur: lundimatin