Pour des villageois que l'on empêche de danser

Nos amis d’Antiopées nous font part d’un document curieux : non pas une des fiches de lecture dont on est coutumiers mais des extraits d’un certain Paul-Louis Courier (1772-1825) à propos d’une interdiction de festoyer dans un village prononcée par un préfet en 1822. Tout le piquant est dans les notes de bas de page qui filent une comparaison avec une décision similaire prise en mars 2021 par le maire d’une petite bourgade du sud-est de la France…

« Les gendarmes se sont multipliés en France, bien plus encore que les violons, quoique moins nécessaires pour la danse. Nous nous en passerions aux fêtes du village, et à dire vrai, ce n’est pas nous qui les demandons : mais le gouvernement est partout aujourd’hui, et cette ubiquités’étend jusqu’à nos danses, où il ne se fait pas un pas dont le préfet ne veuille être informé, pour en rendre compte au ministre ; de savoir à qui tant de soins sont plus déplaisants, plus à charge, et qui en souffre davantage, des gouvernants ou des gouvernés, surveillés, c’est une grande question et curieuse, mais que je laisse à part, de peur de me brouiller avec les classes ou de dire quelque mot tendant à je ne sais quoi. »

Quelque lectrice ou lecteur assidu·e d’Antiopées se souviendra peut-être de Paul-Louis Courier, que j’aime beaucoup lire et dont j’avais déjà utilisé un article voici quelques années à propos d’une réunion des sinistres européens de l’agriculture au château de Chambord. (On peut le lire par ici– et l’on y trouvera aussi quelques références utiles que j’éviterai de redonner ci-après). Figurez-vous que monsieur le maire de F*, dont je préfère oublier le nom, vient de faire appel à madame la préfète de notre département du sud-est de la France afin qu’elle veuille bien interdire à ses concitoyens de festoyer gentiment sur la place publique de F*, le lundi matin, jour de marché. Or il se trouve que ce cher Paul-Louis s’était déjà mis en rogne, dans son style inimitable, contre une décision du même tonneau. J’ai donc ressorti son texte, daté de 1822 mais dont on verra qu’il n’est pas sans intérêt dans le contexte actuel. Enfin, son texte, c’est beaucoup dire : quelques extraits seulement. Bien sûr il faut l’adapter un peu. Je ne le fais pas directement, mais je mets des mots ou des passages entre crochets, dont je donne en notes une ou des variantes possibles ici et maintenant. À l’intention de celles et ceux qui, comme moi, kifferaient ce ton et cette langue superbe, je publie…

La suite est à lire sur: lundi.am
Auteur: lundimatin