Pour Missak, Mélinée, les Dix, les Vingt-Trois et les autres

Autant le dire d’emblée : la panthéonisation de Missak Manouchian est une excellente chose. Dire cela n’interdit aucunement de voir et penser les FTP-MOI, la Résistance et l’émancipation humaine au-delà de l’individu Manouchian, ni de déconstruire le principe-même du Panthéon et de la panthéonisation, ni de crier haut et fort la tartufferie et la duplicité des panthéoniseurs qui convoquent les icônes du cosmopolitisme, de l’internationalisme et de l’antifascisme au moment même où ils endossent, au présent, une bannière de sinistre mémoire : celle de la « valeur travail », du « ré-armemement démographique » et de la « préférence nationale ». Et celle enfin, renvoyant aux mêmes temps de sinistre mémoire, de la destruction du droit du sol. Sans oublier la cooptation, au poste de ministre de la culture, de Rachida Dati, la plus radicale et célèbre activiste de France en matière de combat culturel au service du plus célèbre et radical massacreur d’Arméniens depuis des décennies : le tyran azerbaïdjanais Ilham Aliyev, qui vient de chasser 150000 Arméniens de leurs terres ancestrales dans le Haut Karabagh.

Pour le dire autrement : le Manouch-washing, pas plus que le greenwashing, le pinkwashing ou le gender washing, ne doit faire illusion, ni nous détourner de la mémoire de Manouche, pas davantage que des causes green, pink et féministe. Cette panthéonisation est assurément une opération politique, mais elle signe aussi une victoire militante (soixante dix ans de luttes mémorielles) et constitue un vrai moment d’éducation populaire : des dizaines de supports souvent de qualité – livres, BD, films, docus radio, podcasts, disques, contenus pédagogiques – sont publiés ou republiés, en tout cas visibilisés et vus comme jamais, ils vont essaimer et être appropriés, hors du cadrage étroit et opportuniste, réactionnaire et sans doute révisionniste que tentera d’imprimer le…

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Auteur: Pierre Tevanian