« Pour que les jeunes participent au vote, donnons-leur des enjeux, du débat ! »

Vincent Tiberj est sociologue, chercheur au Centre Émile Durkheim et délégué de recherche de Sciences Po Bordeaux. Il a codirigé un ouvrage collectif, paru en mars 2021, intitulé Générations désenchantées ? Jeunes et démocratie.

Vincent Tiberj. Capture d’écran/YouTube/INJEP


Reporterre — Dimanche 20 juin, 87 % des 18-24 ans ne sont pas allés voter, et 83 % des 25-34 ans. Comment analysez-vous cette abstention massive des jeunes lors des élections régionales ?

Vincent Tiberj — Avec le renouvellement générationnel, le vote est de moins en moins le comportement participatif central des citoyens, au profit d’autres formes de participation politique. Il s’agit d’un changement culturel qui touche également les trentenaires et les quadragénaires. Pendant longtemps, le vote était considéré comme un devoir, les gens votaient de manière automatique, même s’ils n’étaient pas intéressés par le scrutin. Ce rapport électoral était un rapport de soumission : on s’en remettait à des élus, à des leaders. Cette conception du vote disparaît dans les nouvelles générations, avec notamment une remise en cause des figures d’autorité.

Il y a aussi des facteurs conjoncturels : cette campagne électorale a été escamotée, il n’y a pas eu — ou très peu — de travail de terrain pour aller chercher les électeurs. On ne mobilise pas par des réunions Zoom ! On a peu parlé de ces élections, ou alors en axant sur la sécurité, qui n’est pas une compétence régionale ou départementale, et qui intéresse peu les jeunes, plus préoccupés par le climat ou les inégalités. Bref, tous les indicateurs de la participation étaient au rouge.

Dans un tweet, vous soulignez les déséquilibres d’âge dans les urnes. Les 65 ans et plus pèsent dans les urnes 1,4 fois leur poids dans la population. Les 35 ans et moins, presque 2 fois moins que leur poids démographique. Quelles conséquences cela a-t-il ?

Les conséquences politiques sont énormes. Car ces différentes générations — les plus de 65 ans ou les moins de 35 ans — n’ont pas les mêmes valeurs : sur l’environnement, les rapports homme/femme, la diversité. Grosso modo, plus une génération est ancienne, plus elle vote pour Les Républicains (LR). À l’inverse, Europe Écologie-Les Verts (EELV) ou La France insoumise (LFI) attirent plutôt les jeunes cohortes. Du fait de cette mobilisation électorale différentielle, les personnes âgées pèsent politiquement beaucoup plus que les jeunes. Leurs sujets de préoccupation…

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Auteur: Lorène Lavocat (Reporterre) Reporterre