« Pour qu'il y ait vraiment un “Grand Soir”, il faudrait que la révolution ait lieu à divers endroits du monde »

Basta ! : Votre dernier roman, Comme un empire dans un empire, évoque plusieurs mouvements sociaux contemporains : les Gilets jaunes, le hacktivisme, mais aussi Nuit Debout ou les ZAD, notamment. Cela reste encore rare de les voir ainsi saisis comme des objets de littérature. Qu’est-ce qui vous a poussé à travailler dessus ?

Alice Zeniter : Les motivations diffèrent selon les mouvements. Nuit Debout, par exemple, c’est parce que j’y voyais un parallèle avec les Anonymous, notamment dans la manière de s’organiser et de faire collectif : les cercles et les ateliers qu’il y a eus, place de la République, pouvaient ressembler aux forums et aux IRC [Internet Relay Chat, un système de messagerie instantanée, ndlr]. Il y a des figures qui appartiennent en quelque sorte aux deux mouvements : c’est le cas de David Graeber, qui reste hyper présent dans les modes de pensée des pirates et qui a également participé à Occupy Wall Street, puis est venu à Nuit Debout.

Les Gilets jaunes, eux, sont arrivés beaucoup plus par hasard, surgissant en plein processus d’écriture. Je n’avais absolument pas prévu ce mouvement, mais je me suis dit que j’étais obligée de l’incorporer. De fait, il y avait toute sa place, puisque l’une des grandes questions du livre, c’est le doute que l’on peut nourrir à l’égard des politiques institutionnelles et leur capacité à changer les choses. Or les Gilets jaunes nous disent justement qu’ils ne se reconnaissent pas dans la démocratie telle qu’elle fonctionne, qu’ils se sentent à l’écart.

Vous avez participé à certaines manifestations ?

Pas à Paris, j’étais en Bretagne. Mais comme le dit très justement Nathalie Quintane [dans le Nouveau Magazine littéraire], il y a autant de Gilets jaunes qu’il y a de ronds-points. En l’occurrence, il y a eu des ronds-points où je n’étais pas du tout d’accord, mais il suffisait d’en trouver un autre, un peu plus loin, pour se…

Auteur: Barnabé Binctin, Sophie Chapelle
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