Pour une position antiguerre démocratique face à l’invasion de l’Ukraine

La guerre en Ukraine a reconduit et prolongé les débats au sein des gauches dans le monde sur la question de l’anti-impérialisme et des positions stratégiques à adopter. Dans ce court texte, Gilbert Achcar interroge les positions que pourrait prendre le mouvement antiguerre dans le contexte présent.

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Face à l’invasion de l’Ukraine par le régime de Vladimir Poutine, le mouvement anti-guerre a vu se développer des positions fort contrastées. Elles ont en commun de se revendiquer toutes de la paix, un mot derrière lequel peuvent se placer des attitudes très diverses, voire opposées.

On trouve en effet, d’un côté, des appels à un cessez-le-feu inconditionnel, qui laissent entendre, ou même affirment ouvertement, que les États de l’OTAN devraient forcer les Ukrainiens à cesser le combat en cessant de leur livrer les moyens de leur défense. Cette position, si elle peut émaner dans quelques cas d’un pacifisme authentique et d’un souci réel d’épargner des vies humaines, n’en est pas moins hautement problématique du fait qu’elle ne définit pas les conditions du cessez-le-feu souhaité. Dans la tradition du mouvement antiguerre, tout appel à l’arrêt des combats en cas d’invasion d’un pays par un autre doit être assorti de l’exigence du retrait des envahisseurs, à défaut de quoi il peut légitimement être soupçonné de vouloir entériner l’acquisition de territoire par la force.

De l’autre côté se trouvent des antiguerres pour qui l’opposition à l’invasion russe et le soutien au droit des Ukrainien.ne.s de se battre pour la libération de leur territoire est la considération prioritaire. Si ce point de départ est certes plus légitime du fait qu’il prend le parti des victimes de l’agression, il peut néanmoins aboutir à placer trop haut la barre de la paix. Dans certains cas, il n’est même plus question de cessez-le-feu : la paix se trouve définie comme ayant pour condition nécessaire le retrait des troupes russes de toutes les parties du territoire ukrainien internationalement reconnu, ce qui inclut non seulement l’intégralité du Donbass, mais aussi la Crimée annexée en 2014.

Quelle que soit l’intention qui anime une telle position, elle risque d’être confondue avec celle des jusqu’au-boutistes ultranationalistes ukrainiens. Elle risque aussi de se retrouver en porte-à-faux devant les majorités des opinions publiques d’Europe et d’Amérique du Nord qui, si elles sympathisent avec le combat des Ukrainien.ne.s pour leur légitime défense, ne sauraient…

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Auteur: redaction