Pourquoi courir dans les champs ?

Mouvement contre l’accaparement de l’eau. Samedi 29, assaut émeutier de plusieurs milliers de personnes à l’occasion de la mobilisation interdite contre le chantier d’une méga-bassine. Dimanche 30, sabotage d’une canalisation sous les caméras. Partisans d’un certain éco-populisme à tendance insurrectionnelle, les organisateurs avaient promis, selon la formule consacrée, une manifestation joyeuse et déterminée, promesse tenue. Le but était d’atteindre le cratère de la future bassine, pari réussi.

La sous-préfète tente de se féliciter du déroulement de la journée, arguant que les manifestants ont été repoussés, et l’occupation du site stoppée net. Mais la gendarmerie a bel et bien été enfoncée, lignes après lignes. La probabilité qu’elle ait été particulièrement nulle nous enlève la certitude d’avoir été particulièrement bons, ceci dit, l’assaut a été continu et il n’y a pas eu l’ombre d’une hésitation pendant deux heures et demie. Non seulement cette détermination a été intense et continue, mais elle a été partagée à un degré très rarement atteint. Comment dire ? Il y a eu parmi les participants un alignement tactique par le haut. Cela atteste au moins de la possibilité d’un alignement stratégique par le haut.

Quels discours environnent l’événement ? Des têtes d’affiche écologistes, plus ou moins dans le forçage, apportent leur soutien avant la manif. L’un d’eux repart du camp avec le mot « crevure » peint sur sa voiture, deux fois. Plus radicale, sa collègue dit qu’il paye pour sa défense d’une écologie de gouvernement, au détriment d’une écologie de combat. Elle-même parlait ces derniers jours de « la guerre de l’eau », et décorait Rémi Fraisse de la médaille de « premier mort ». On ne doute pas que la gauche défende la révolution à titre posthume. Un responsable trotskiste dit que la question de la violence se pose, sous les applaudissements. La manif démontrera qu’elle ne se pose plus. Suite à celle-ci, le ministre de l’Intérieur « n’hésite pas à parler d’éco-terrorisme », disposant à l’avenir d’une marge de manœuvre sémantique plutôt étroite. « Dérapage », rétorque le numéro 1 des mélenchonistes, qui réclame par ailleurs une police républicaine (« La République, c’est moi »). À l’Intérieur on martèle une réponse : il n’y aura pas de ZAD à Sainte-Soline. Mais personne n’avait posé la question. Il y a des journées qui semblent comme douées de la parole, aptes…

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Auteur: lundimatin