Présidentielles 2022 : Construire la gratuité de l'eau élémentaire, oui, mais comment ? — Paul ARIES

L’eau n’est devenue payante qu’au XXe siècle sous prétexte de progrès, que résumait le fameux slogan « eau courante à tous les étages », et avec l’essor des entreprises privées spécialisées. Le droit à l’eau existait depuis longtemps, d’abord garanti par des travaux collectifs, puis par la mise en place de fontaines et de lavoirs publics. L’eau, devenue marchandise, ne garantit plus le droit à l’eau. Il ne suffit plus d’être un humain encore faut-il être solvable. Un golf est plus solvable que des enfants de bidonville, aussi a-t-il priorité. 2,6 milliards d’humains (soit 40 % de la population mondiale) n’ont ainsi pas accès à l’eau potable et à l’assainissement de base. 50 millions sont atteints chaque année de maladies véhiculées par l’eau et 4 millions en décèdent. La Banque mondiale reconnaît que « près de 1,6 milliard de personnes – presque un quart de l’humanité – vit dans des pays ayant une rareté physique en eau et annonce que d’ici à vingt ans, ce chiffre pourrait doubler ». La quantité d’eau potable par humain devrait encore baisser d’un tiers en vingt ans et de 50 % dans les 40 ans. L’OMS estime que cinq cent millions à un milliard d’humains se trouveront alors en état de pénurie et deux milliards et demi en situation critique. Lors d’un entretien, Danielle Mitterrand attirait mon attention sur le fait que « Ce n’est pas un problème de pénurie puisque la biosphère est constituée de 90 % d’eau, mais un problème lié à l’usage que l’homme en fait (…) Il est reconnu que si nous ne changeons pas la façon de penser l’eau dans le monde, l’humanité sera en danger de disparition ».

Le capitalisme, en faisant de l’eau une marchandise, a transformé cette ressource en imposant ses infrastructures et technologies. L’eau capitaliste n’est plus l’eau précapitaliste et il serait stupide de préconiser de rendre cette eau-marchandise… gratuite. Cette prétention serait vouée à l’échec tant la logique capitaliste est présente du début à la fin du processus de production et de gestion. C’est pourquoi l’eau-marchandise n’est pas seulement mauvaise socialement mais aussi écologiquement et même politiquement. L’eau-marchandise n’est pas plus soluble dans l’écologie ou le social que l’écologie et le social ne s’avèrent solubles dans le capitalisme.

Les nappes phréatiques sont largement polluées et leur niveau baisse. Le changement climatique entraînera des ruptures d’ici 2050. Le gaspillage est environ du…

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Auteur: Paul ARIES Le grand soir