Procès Deliveroo, une victoire historique pour les livreurs face à l'ubérisation

« Deliveroo est condamnée à l’amende maximale. » Des exclamations de joie étouffées retentissent dans la salle d’audience du tribunal correctionnel de Paris. Les parties civiles, militantes et militants pour les droits des travailleurs des plateformes et les ex-livreurs peinent à contenir leur soulagement. Reconnue coupable de travail dissimulé, la plateforme de livraison de repas devra s’acquitter d’une amende de 375 000 euros. Ses deux anciens directeurs sont tous deux condamnés à un an de prison avec sursis. L’entreprise doit aussi verser aux 116 travailleurs qui se sont portés parties civiles des dommages et intérêts de quelques milliers d’euros chacun.

« Deliveroo avait conscience de cette situation de subordination, comme le montre leur volonté de modifier la loi pour coller avec leurs pratiques. La plateforme concevait la flotte des livreurs comme une variable d’ajustement, martèle la présidente au tribunal. C’est un détournement du régime du travail indépendant. » C’est la première fois qu’une plateforme de livraison de repas à domicile comme Deliveroo est condamnée pour « travail dissimulé » par une juridiction pénale française.

« Ce que ce jugement dit, aujourd’hui, c’est que leurs pratiques sont bien un préjudice à la société, pas juste à des individus », se réjouit Barbara Gomes, élue communiste et juriste engagée aux côtés des travailleurs des plateformes. « Le pénal, ça fait mal. Ça montre qu’ils ne peuvent pas continuer. Là, ce n’est pas un petit chèque fait à un livreur individuel aux prud’hommes. La justice pénale, ici, c’est aussi la justice sociale. » Jusqu’ici, les plateformes n’ont été condamnées que devant des instances civiles. L’affaire la plus connue est celle de Take it easy, dont la condamnation à requalifier un travailleur indépendant en salarié a été confirmée par la Cour de cassation en 2018. Pourtant, cette fois, ce n’est pas que d’un salarié dont il s’agit : c’est la société qui condamne les pratiques de Deliveroo.

« Me mettre en danger pour des courses à cinq balles, je ne veux plus jamais ça »

« C’est encore mieux que ce qu’on pouvait espérer. C’est un grand pas en avant. » Ce mardi, Yacine, 29 ans, a assisté, comme d’autres, à cette condamnation historique. Le livreur pour Deliveroo de 2017 à 2019 en sort avec un sourire de fierté, après des années « de pression permanente » à travailler pour l’entreprise. « Quand je bossais pour eux, j’étais un robot. Je…

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Auteur: Emma Bougerol