Quand la Chine organise un nouvel espace de vassalité

Le sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) tenu à Samarcande (Ouzbékistan) les 15 et 16 septembre aura marqué les esprits pour au moins trois grandes raisons : tout d’abord, parce que chaque sommet international rassemblant plus d’une vingtaine d’États représentant plus de 40 % de la population mondiale est un événement notable ; ensuite, parce que l’OSC prend de plus en plus la forme d’un club de puissances nucléaires non occidentales (Chine, Russie, Inde, Pakistan… et Iran) ; enfin, parce que la réunion qui vient de s’achever, organisée en plein recul de l’armée russe en Ukraine, a mis en évidence la perte d’influence de Moscou au profit de la Chine dans cet immense espace eurasiatique.

Qu’est-ce que l’OCS ?

Précisons d’abord ce que l’OCS n’est pas : contrairement à ce que l’on entend parfois, ce n’est ni une alliance, ni une « OTAN eurasiatique », ni une sorte de « G20 bis ». Cette organisation, encore trop méconnue en Occident, est le produit de la recomposition de l’ordre international consécutive à l’implosion de l’URSS et de la volonté de Pékin d’affirmer son influence dans son pourtour asiatique.

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Une première réunion a lieu en 1996 à Shanghai, entre la Chine, la Russie, le Kazakhstan, le Tadjikistan et le Kirghizistan – d’où le nom initial de « Groupe de Shanghai ». Petit à petit, Pékin va institutionnaliser cette plate-forme régionale, qui devient l’OCS en 2001, intégrant au passage l’Ouzbékistan. L’Organisation va organiser annuellement des sommets consacrés aux questions sécuritaires et économiques et, ces dernières années, s’ouvrir à de nouveaux membres. Les six pays fondateurs de 2001 sont rejoints par l’Inde et le Pakistan en 2017, puis par l’Iran en 2021.

Emmanuel Véron, Fourni par l’auteur

Depuis l’ère Deng Xiaoping (1978-1989), l’appareil du Parti-État met en œuvre une « diplomatie multilatérale » (duobian waijiao) qui a pour ambition première de remodeler les routes commerciales eurasiatiques au départ de la Chine en connectant l’Asie centrale, la Russie et l’Europe.

Plusieurs leviers institutionnels y pourvoient, et notamment l’OCS. Initiée par Pékin et Moscou afin de stabiliser et de limiter l’influence occidentale en Asie centrale, l’OCS est un outil diplomatique pleinement investi par Pékin comme espace de dialogue et d’influence, de commerce et de coopération militaire. C’est ainsi qu’en 2017, la Chine a favorisé l’entrée du Pakistan dans l’OCS pour faire contrepoids à l’entrée de l’Inde, soutenue quant à elle par la Russie. Enfin, après plusieurs années de discussions, l’Iran est devenu membre en…

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Auteur: Emmanuel Véron, Enseignant-chercheur – Ecole navale, Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco)