Cet article est publié en partenariat avec la Revue Salamandre.
« C’est une belle récompense ! », s’exclame Emmanuel, agriculteur bio dans une basse plaine alluviale. Il revient sur la modeste expérience nature qu’on a partagée ensemble il y a quelques mois, lorsque des busards ont investi ses parcelles céréalières.
« L’enseignement que j’en retire, c’est que semer des couverts végétaux en hiver, plutôt que laisser les labours nus, cela profite vite à la faune. » Le Jurassien précise avoir initié ces bonnes pratiques pour leurs bienfaits agronomiques, avant même que la politique agricole commune de Bruxelles ne les dicte. « Je suis désormais doublement motivé pour continuer dans ce sens », ajoute-t-il.
Drones à plumes
Tout a commencé, un soir de novembre, lorsque j’ai aperçu l’ombre furtive de quelques rapaces plonger dans un champ que, pour ma part, je qualifiais naïvement de friche… Cela faisait bien deux semaines que j’avais repéré ces busards Saint-Martin chassant en journée dans la grande plaine. J’adore ces oiseaux élégants et opiniâtres, qui survolent inlassablement le damier parcellaire monotone. Ils le font probablement avec méthode, mais en même temps avec un air nonchalant.
Je remarque cet automne-là que les jeunes haies créées par Emmanuel ces dernières années — plusieurs kilomètres ! — sont prisées par ces drones à plumes. Il n’y a pas photo, dès qu’un peu de structure et d’irrégularité revient casser l’uniformité du paysage agricole intensif, la vie s’y accroche ou s’y faufile. Le busard prédateur a plus de chances de débusquer un bruant ou un campagnol dans les bandes fleuries ou au pied des buissons réimplantés que dans les déserts de terre labourée.
Connaissant la tendance grégaire de ces oiseaux la nuit à cette saison, je me convaincs de revenir un soir chercher un éventuel lieu de dortoir. À l’inverse des buses et autres…
Auteur: Jean-Philippe Paul