Quand Proton livre une adresse mail à la police : « On s'est senti trahi par une messagerie alliée »

L’information avait fait grand bruit. À la suite d’un texte publié sur Paris Luttes Info début septembre, l’entreprise de messagerie Proton Mail avait reconnu avoir livré à la police française les métadonnées de l’adresse mail d’activistes luttant contre la gentrification (un processus qui, par des opérations de rénovation urbaine et d’augmentation des loyers, aboutit à évincer les classes populaires des centre-villes) du quartier Sainte-Marthe, dans le 10e arrondissement de Paris. « Or, Proton Mail s’est construit une image de messagerie alliée des militants et des mouvements sociaux », souligne Imane Bello, avocate en droit du numérique. C’est l’argument de vente de Proton Mail : une messagerie sûre et cryptée. Argument toujours revendiqué par l’entreprise dans son communiqué publié à la suite de cette affaire : « Nous comprenons vos préoccupations et nous sommes à vos côtés – nous sommes aussi des militants. ».

Les poursuites engagées contre les activistes du quartier Sainte-Marthe ont débuté l’année dernière. À l’automne 2020, un camp climat est organisé à Paris par plusieurs mouvements écologistes, dont Youth for Climate et Désobéissance Écolo Paris, contre la gentrification dans l’arrondissement. Le 14 novembre 2020, plusieurs militants, regroupés au sein du Collectif de la place Sainte-Marthe, décident d’ouvrir un squat. Le lieu choisi, situé à l’angle de la rue Jean-et-Marie-Moinon et de la rue Saint-Maur, est appelé L’Arche. Appartenant au bailleur social parisien la SIEMP, ce local de près de 200 m2 est, depuis décembre 2015, loué aux propriétaires du restaurant Le Petit Cambodge, qui le laissaient inoccupé (voir notre reportage).

Que ce local appartienne aux propriétaires de l’un des restaurant pris pour cibles des attentats parisiens du 13 novembre 2015 donne à l’affaire une dimension plus politique. « Ça a terriblement brouillé le message initial », note Erika, une militante du quartier, en lutte pour le maintien des activités artistiques et artisanales. « À partir de là, ça nous a un peu dépassé. Ils ont voulu faire un exemple de notre cas. Et on s’est pris une répression féroce », confie de son côté Antoine*, militant actif dans le quartier.

La police française est passée par Europol

Une « répression féroce » que personne, parmi tous les militants rencontrés, ne souhaite décrire précisément. « On ne veut pas aggraver notre cas, on se fait discret », dit une militante. Certains décrivent…

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Auteur: Pierre Jequier-Zalc