Quand réindustrialisation et coopétition vont de pair dans le monde des chaussures de sport

850 millions d’euros, telle est la somme que le gouvernement français a pris la décision d’engager pour favoriser une relocalisation industrielle sur le territoire national. Priorité née de la crise Covid et des difficultés logistiques engendrées, elle a été encore réaffirmée par le président de la République à l’occasion du Mondial de l’automobile. Les deniers ont été utilisés à la suite d’appels à projets adressés à cinq secteurs considérés comme « critiques » : la santé, l’agroalimentaire, l’électronique, les intrants essentiels de l’industrie (chimie, matériaux, matières premières) et la 5G. 477 lauréats ont finalement été retenus.

Pour beaucoup cependant, à l’instar des économistes Elie Cohen et Pierre-André Buigues, auteurs récemment d’une tribune acide dans les colonnes du Monde, nous sommes loin du compte. Un des obstacles principaux reste celui des coûts de production, encore très élevés en France par rapport à ceux des pays émergents, un obstacle face auquel l’inflation et les craintes de pénurie d’énergie n’aident pas.

Coopération entre concurrents

Au-delà des aides de l’État, nos travaux de recherche, menés au sein du Coopetition Lab et de la Chaire Coo-innov, indiquent qu’une stratégie semble assez efficace et sans doute à promouvoir : la coopération entre concurrents, que l’on appelle parfois « coopétition ». Non seulement elle permet de diminuer les coûts en les mettant en commun car des concurrents produisent souvent à partir d’infrastructures similaires ; mais encore, le partage des connaissances offre la possibilité de lancer des programmes ambitieux et favorise l’innovation. Souvenons-nous sur ce dernier point comment les chercheurs de BioNtech et de Pfizer se sont rapidement entendus et ont croisé leurs connaissances pour créer ensemble le premier vaccin efficace contre le Covid.

La coopétition est une stratégie dont l’intérêt pour les entreprises est de plus en plus reconnu. Elle apparaît comme pertinente tout autant pour les projets menés par les grandes entreprises dans les secteurs de haute technologie, comme le projet Galileo, ou le développement de jeux vidéo chez Ubisoft, que pour les petites entreprises dans des secteurs traditionnels comme le vin.

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Un cas exemplaire de réussite de cette stratégie, autour d’un projet de réindustrialisation de l’hexagone, est celui de Salomon, Babolat et Millet, trois grands noms du secteur des chaussures de sport. Tous les trois, dans l’objectif de relocaliser leur production en France, se sont entendus pour faire produire une partie de leurs chaussures par le même sous-traitant, Chamatex, dans une même usine, qu’ils ont financée ensemble quelque part au nord de l’Ardèche, dans un petit…

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Auteur: Frédéric Le Roy, Professeur de Management Stratégique – Université de Montpellier et Montpellier Business School, Université de Montpellier