« Que met-on sur les vignes dans le Bordelais ? » : la question à 125 000 euros que Valérie Murat a osé poser

Son père vigneron est mort au travail d’avoir trop utilisé de pesticides. Il a été emporté par un cancer bronchopulmonaire en 2012. Le caractère professionnel de sa maladie a été reconnu : pendant 42 ans, il avait traité ses vignes avec de l’arsénite de sodium (principe actif d’un fongicide). Valérie Murat a donc décidé de faire de la lutte contre les pesticides dans le vin son combat.

Et elle n’a pas l’intention de baisser la tête face au puissant lobby du vin bordelais. Il y aurait pourtant de quoi. Après avoir révélé la présence de nombreux pesticides dans divers vins de la région, elle a été condamnée à verser 125 000 euros de dommages et intérêts. Une somme largement au dessus de ses moyens qui vise selon elle à « la faire taire ».

L’affaire commence en septembre 2020. L’association, « Alerte aux toxiques », fondée par Valérie Murat publie une analyse qui révèle la présence de résidus de pesticides dans 22 vins certifiés Haute Valeur Environnementale. Toutes les bouteilles contiennent des molécules – sept en moyenne – considérées comme des perturbateurs endocriniens potentiels. Dans onze bouteilles, des traces de substances classées CMR (cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques) probables sont mises en évidence. Neuf bouteilles renferment au moins un des fongicides dits SDHI« Ces résultats montrent des écarts importants entre le marketing, les promesses et la réalité des pratiques professionnelles », commente alors Valérie Murat.

Dans le Bordelais, c’est la panique. Le Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB) porte plainte pour « dénigrement », considérant qu’elle porte atteinte à l’image des vins de Bordeaux. Plusieurs vignerons lui emboîtent le pas. Pour Bernard Farges, président du CIVB, les quantités de pesticides décelées dans les vins étaient infinitésimales : « Quand on est entre 60 et 5000 fois en-dessous des limites autorisées par la règlementation française, on est 60 à 5000 fois en-dessous de la règle. Alors, dire que ces vins sont dangereux, c’est du dénigrement. »

« Ils ont fait de moi une sous-citoyenne, qui ne peut pas exercer son droit de faire appel »

Une première audience se tient en décembre 2020. La condamnation tombe en février suivant. La note est salée : Valérie Murat et son association sont condamnées à verser 125 000 euros de dommages et intérêts. Elles décident de faire appel et commencent à payer les dommages et intérêts. Les plaignants ont en effet…

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Auteur: Nolwenn Weiler